International
08H37 - lundi 25 mars 2013

Guerre au Mali, la clef du développement – Partie 2 : Les enjeux géostratégiques de l’intervention française

 

François Hollande a justifié l’intervention de la France au Mali au nom de la lutte contre « le terrorisme ». Or, le conflit malien ne se limite pas à la seule question terroriste. La crise que traverse le pays depuis l’indépendance de la France et la première rébellion touareg en 1962 trouve ses origines dans un dysfonctionnement socio-économique profond dont les violences terroristes ne seraient qu’une manifestation. Pauvreté, mécontentement social, inégalités, divisions intercommunautaires, marginalisation des populations du nord et manque chronique de gouvernance sont des éléments auxquels il convient de s’intéresser de près si l’on souhaite trouver une solution viable au marasme dans lequel le Mali s’est embourbé. Au cœur de cet effort, les enjeux géostratégiques sont fondamentaux.

La France s'active via ses alliés européens et africains pour stabiliser le Mali. Un besoin qui répond à des considérations gérostratégiques. Ici lors de la réunion interministérielle sur le Mali hébergée par l'UE à Bruxelles présidée par l'Union Africaine, les Nations Unies et la CEDEAO.  De gauche à droite : M. Tieman COULIBALY, ministre des affaires étrangères du Mali, M. Ramtane LAMAMRA,Commissaire de l'Union africaine pour la paix et la sécurité, M. Catherine ASHTON Haut représentant aux affaires étrangères et à la politique de sécurité de l'UE, M. Kadré Désiré OUEDRAOGO, président de la Commission de la CEDEAO

La France s’active via ses alliés européens et africains pour stabiliser le Mali. Un besoin qui répond à des considérations géostratégiques. Ici lors de la réunion interministérielle sur le Mali hébergée par l’UE à Bruxelles présidée par l’Union Africaine, les Nations Unies et la CEDEAO. De gauche à droite : M. Tieman COULIBALY, ministre des affaires étrangères du Mali, M. Ramtane LAMAMRA,Commissaire de l’Union africaine pour la paix et la sécurité, M. Catherine ASHTON Haut représentant aux affaires étrangères et à la politique de sécurité de l’UE, M. Kadré Désiré OUEDRAOGO, président de la Commission de la CEDEAO ©EEAS

Les enjeux géostratégiques de l’intervention française

La proximité du Mali d’avec le Niger et son uranium, de l’Algérie avec son gaz et son pétrole et de la Mauritanie pétrolifère, fait de ce pays et de la zone du sahel occidental toute entière un périmètre à protéger et dans lequel il est intéressant de s’assurer des espaces de contrôle.

La France l’a bien compris et a depuis longtemps, avec ses entreprises à ses côtés, investi ces terres. Le pays via l’entreprise Areva (ancienne Cogema), y puise l’énergie nécessaire à l’alimentation de plus du tiers des 58 réacteurs nucléaires de ses centrales nucléaires en 2009. La France a en effet obtenu le monopole de fait de la production d’uranium nigérien, et jusqu’en 2007, le géant français du nucléaire Areva était l’opérateur unique des deux principales mines du pays. En 2010, l’investissement consenti par Areva s’élevait à 155% du budget nigérien (2). L’entreprise française projette de commencer, mi-2015, à exploiter la deuxième plus grande mine au monde, située à Imouraren dans le Nord du Niger. La production de la mine à ciel ouvert devait initialement commencer en 2012 mais la date a été repoussée à plusieurs reprises par crainte pour leur sécurité, les groupes armés qui y opèrent depuis des décennies font en effet courir un risque de plus en plus évident aux salariés des entreprises françaises qui extraient de l’uranium au nord du Niger. La France doit donc faire en sorte que le conflit ne se propage pas au Niger – qui connaît les mêmes difficultés socio-économiques que le Mali et une menace armée presque comparable – s’il veut s’assurer l’approvisionnement des centrales nucléaires françaises en uranium.

La sécurisation de la zone est également indispensable à la postérité de l’exploitation florissante des richesses pétrolières que les entreprises françaises sont parvenues à acquérir. ELF Aquitaine y puise ainsi près de 60% de sa production de pétrole et Total – dont la moitié des possessions pétrolières se trouvent dans la partie mauritanienne du bassin de Taoudéni – a déjà affirmé son intérêt de financer le projet de gazoduc transsaharien qui reliera le Nigeria et l’Algérie d’ici 2015-2016 (3). Par ailleurs, il ne faut pas omettre que la chute du régime de Kadhafi a ouvert la perspective d’une redistribution des richesses pétrolière et gazière dans la région du Sahel.

On comprend donc bien que la garantie sécuritaire est l’une des conditions de l’investissement des entreprises étrangères en vue de l’exploitation d’un site donné et donc l’un des rares leviers de développement pour nombre de pays de la zone. Mais ce levier reste « relatif » pour certains Etats à en croire les chiffres des activités aurifère et uranifère au Mali et au Niger. Alors qu’en 2012 l’or représentait environ 70% des recettes d’exportation du Mali, il n’a contribué qu’à environ 15% du PIB du pays. Pareillement, si le Niger tire 140 millions de dollars par an de ces mines, qui représentent 30 % des exportations de l’Etat, l’uranium ne représente plus que 5% des recettes du budget national contre 50% dans les années 70. Comment expliquer que le budget national du 4e plus gros producteur mondial d’une denrée aussi recherchée que l’uranium soit en proportion si peu alimenté par les revenus issus de l’exploitation de cette richesse si lucrative ? 

Helen Wilandh et Claire Fanchini

Sources :

(2) Grégoire E, “le Niger : un État à forte teneur en uranium”, dans “Hérodote” 2011/3, p. 220

(3) Augé B. “Le Trans Saharan Gas Pipeline Mirage ou réelle opportunité ?”, notes de l’IFRI, Mars 2010

 

Researcher for the Mali Civil Society and Peacebuilding project at SIPRI

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