La chronique de Patrick Pilcer
11H49 - jeudi 5 septembre 2024

À défaut d’avoir le sens du timing, Edouard Philippe garde au moins le sens de l’humour ! La Chronique de Patrick Pilcer

 

Alors que tous les Français attendent de savoir quel sera le prochain locataire de Matignon, et surtout quel programme mettra en œuvre le prochain gouvernement, Edouard Philippe déclare sa candidature pour la prochaine élection présidentielle.

Nous avions eu la candidature de Coluche en 1981, alors pourquoi pas Edouard Philippe en 2024. Après tout, s’il veut respecter scrupuleusement la limitation de vitesse à 80km/h, il lui faut effectivement démarrer au plus tôt s’il ne veut pas arriver loin du peloton de tête pour 2032…

Plus sérieusement, Edouard Philippe déçoit une fois de plus les Français. Il n’avait pas vu venir les Gilets Jaunes, malgré tous les signes avant-coureurs ; il a complètement « cafouillé » les premiers mois de la lutte contre la pandémie de la Covid-19, avec les pénuries de masques, les autorisations de sortie, les métiers dits essentiels, sa porte-parole qui disait ne pas savoir se servir correctement d’un masque, car « l’utilisation d’un masque, ce sont des gestes techniques précis », et qui revendiquait le droit de mentir pour protéger le président…

Surtout, Premier Ministre pendant 3 ans, il a laissé filer les dépenses publiques et a participé grandement au dérapage incontrôlé du déficit abyssal et de la dette publique dont nous souffrons aujourd’hui. Si nous sommes devant un mur budgétaire et risquons de passer sous les fourches caudines du FMI sous peu, Edouard Philippe en est en grande partie responsable…

Et aujourd’hui, plutôt que de proposer un plan de sortie de crise, plutôt que de présenter aux Français des mesures concrètes pour améliorer leur pouvoir d’achat, pour augmenter la création et la production de richesses de notre économie, pour améliorer la sécurité des Français, pour revitaliser notre pays dans une Europe qui a profondément changé en 40 ans, pour moderniser notre Ecole, nos Hôpitaux, nos Universités, notre Défense, pour traiter enfin les sujets brûlants liés à l’immigration, pour faire respecter la Laïcité, pour refaire Nation, pour que nous souhaitions tous à nouveau Vivre Ensemble, Edouard Philippe nous dit simplement qu’il proposera quelque chose de « massif » !

Lui qui a commencé au PS avec Rocard, puis a rejoint l’UMP avec Juppé, puis Areva en tant que lobbyiste, puis à nouveau Juppé, puis Macron une fois Juppé hors-jeu, va sortir de son chapeau du « massif » : l’invention de l’eau froide !

Édouard Philippe résume à lui seul ce que les Français ne supportent plus chez les hommes politiques : bien sûr les zigzags, qui prennent plus de temps que la ligne droite pour atteindre un but, mais surtout, il met sa candidature avant son programme, la charrue avant les bœufs, son ego avant l’intérêt général, un comportement « has been » !

Dans le moment difficile que notre République vit, il y a pourtant un moyen d’être apprécié, reconnu par les Français, et d’être alors le candidat naturel allant du Centre Gauche à la Droite.

Ce n’est pas de dire « moi, moi candidat ». C’est de proposer des idées, des mesures concrètes et faire émerger ainsi une majorité de progrès à l’Assemblée Nationale, cette Assemblée introuvable, ingouvernable, issue d’une dissolution hasardeuse, et totalement ratée. Plutôt que de se concentrer sur le choix d’un nom, Macron aurait dû réunir autour d’une grande table les responsables politiques compatibles et les faire s’accorder sur une plateforme de gouvernement, puis sur le choix d’une équipe, puis sur le choix d’un premier ministre.

Le Président aurait alors pu franchir les « non » systématiques des extrêmes, qui se nourrissent du chaos et ne cherchent en rien l’amélioration de la situation du pays. Macron comme Philippe ont la fâcheuse habitude de mettre la charrue avant les bœufs, comme sur la réforme des retraites, qui aurait dû être précédée de mesures pour améliorer l’employabilité des seniors comme l’entrée sur le marché du travail des plus jeunes.

Celui qui proposera un pacte de gouvernement, même réduit à trois ou quatre mesures, à une ou deux réformes, et qui réussira à réunir une majorité même relative autour de lui, même s’il n’est pas Premier Ministre en poste, sera le vainqueur de la prochaine élection présidentielle.

Les Français attendent non pas forcément un homme providentiel, un nouveau de Gaulle, Churchill ou Clemenceau. Ils attendent quelqu’un qui placera l’intérêt général avant sa carrière, avant sa personne, quelqu’un qui agit, ici et maintenant, et ne se contente pas de paroles, de grands débats, quelqu’un qui reprenne, vraiment, les Finances Publiques en main, qui réduise le déficit public, non pas en alourdissant plus encore les impôts, la réponse classique de notre classe politique depuis Raymond Barre et Pierre Mauroy, quelqu’un qui se retrousse les manches et optimise nos services publics, les modernise, les adapte, les fasse entrer dans le XXIème siècle.

Celui qui pense d’abord à son prochain poste n’aura aucun avenir. Celui qui agira dans le sens de l’intérêt général d’abord, et qui par conséquent nous évitera le mur, la crise profonde, le FMI et la honte, celui-ci sera non pas à Matignon demain mais à l’Elysée très vite !

 

Patrick Pilcer
Conseil et expert sur les marchés financiers, président de Pilcer & Associés, Chroniqueur Opinion Internationale