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06H48 - vendredi 14 janvier 2022

Le vœu de Molière : speak French !

 

Lorsque l’École des femmes est jouée en 1662, la « troupe de Monsieur, frère du roi » est déjà bien connue dans toute la France.

L’intrigue met en scène Arnolphe, vieil aigri qui veut s’assurer de la fidélité de sa future femme. Pour se faire, il choisit une épouse très jeune (l’âge légal pour se marier est de 12 ans pour les filles du XVIIème siècle) et décide de l’enfermer dans un couvent afin qu’elle n’apprenne rien :

« Je la fis élever selon ma politique,
C’est-à-dire ordonnant quels soins on emploierait
Pour la rendre idiote autant qu’il se pourrait »

L’éducation viendra par le mariage, en la modelant selon son bon vouloir (« du côté de la barbe est le pouvoir ») ! La tentative échoue bien sûr, car il s’agit d’une farce, mais Molière souligne bien là sa volonté de voir les femmes s’émanciper de maris trop jaloux et contrôlants. La société de l’époque est éminemment patriarcale puisque la femme n’existe pas sur le plan social en dehors de son époux et elle a, fort heureusement, évolué. Mais la pièce et de nombreuses autres, montre que le vœu le plus cher de Molière était que chacun puisse s’élever par l’éducation : mieux connaître le monde, manier correctement la langue française, « faire de la prose sans le savoir »,… Jean-Baptiste Poquelin pourrait tout d’abord se réjouir que le Français reste la deuxième langue étrangère la plus apprise au monde derrière l’anglais, permettant aux étrangers d’avoir accès aux magnifiques textes de Victor Hugo, de Charles Baudelaire ou de Jacques Prévert, mais aussi d’écouter Piaf ou Aznavour. Mais il pourrait souhaiter une France plus à cheval sur la grammaire et l’orthographe, où les SMS n’afficheraient pas « sa va ? », où les accords seraient respecter respectés et la variété de la langue préservée (non, « wech » n’est pas la réponse à toutes les questions).

Alors, au futur président de la République française, on peut aisément imaginer que Molière demanderait plus de moyens pour l’Éducation nationale et un ministre qui ne serait pas un Tartuffe. Nous devons à tout prix remotiver ceux qui modèlent nos enfants pour qu’ils leur transmettent une pensée plus riche, plus complexe. Quand on obtenait autrefois son Certificat d’études, on ne faisait pas de fautes d’orthographe. Certes, aujourd’hui on sait se servir également d’un ordinateur, on possède un minimum de notion en chimie et en biologie. Mais commençons par le commencement : la langue reste le fondement de notre société, car plus on est en capacité de s’exprimer et plus on est à même d’appréhender le monde et de se comprendre les uns les autres. Alors, offrons aux jeunes Français, de tous horizons, les méthodes et les moyens de discourir intelligiblement pour se faire entendre, voilà qui serait un bel hommage à la langue de Molière.

Deborah Rudetzki

 

 

Directrice de la Rédaction