Valeur compliance
06H04 - mardi 16 novembre 2021

Echec de la COP26 : abandonnons des objectifs vains et misons sur la compliance. L’édito de Michel Taube et Yani Hadar

 

L’émotion de Alok Sharma, président de la COP26 de Glasgow.

Opinion Internationale lance la rubrique « Valeur compliance » destinée à tous les risques non financiers des entreprises et des acteurs privés et publics : environnement, égalité femmes — hommes, diversité, RSE, la compliance est, avec la productivité et les bénéfices, le second secret de la réussite!

La rubrique est animée par Yani Hadar, expert doté d’une expérience de huit années acquises dans le secteur de la compliance et du contrôle interne (missions dans le financement de projets, l’énergie et le secteur bancaire) et à l’international (France, Luxembourg, Maghreb).

 

 

La COP 26 qui vient de se clôturer à Glasgow est un échec certain. Pour une raison simple : sous la pression de l’opinion publique internationale, les pays leaders de ce monde rivalisent, de conférences en Sommets internationaux, de promesses plus alléchantes les unes que les autres. Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a d’ailleurs dénoncé des promesses qui lui « sonnent creuses ». C’est sûr, s’engager sur des résultats colossaux en 2070, c’est vraiment se dire que plus c’est gros, mieux ça passe dans les opinions ! C’est prendre les gens pour des naïfs et des ignorants !

Si l’on s’intéresse aux pays émergents, Samuel Jinapor, le ministre ghanéen des Terres et des ressources naturelles, a évoqué le fait que le coût des engagements climatiques pour le seul Ghana serait de 22,6 milliards de dollars. Ipso facto, les pays émergents ne peuvent financer, pour le moment, ce type de politiques. C’est la raison pour laquelle l’un des enjeux de la COP26 était que les pays riches réunissent 100 milliards de dollars par an pour aider ces pays. Or ce montant ne devrait pas être atteint avant 2023. Le niveau de promesses s’élèverait pour le moment à 79 milliards d’euros par an, les États-Unis de Biden n’ayant pas encore apporté leur quote-part depuis leur retrait sous Donald Trump en 2016.

Par ailleurs, les marchés de carbone ne semblent pas être la meilleure solution, même si le ministre ghanéen opte pour cette solution.

La solution préférable serait plutôt de frapper au porte-monnaie ou, mieux, de convaincre l’argent de bien se placer et d’arriver à bon lorsqu’il est destiné à de nobles causes (environnement, santé, éducation, formation, nutrition…). Il n’y a que cela qui marche.

Or pourquoi la COP26 n’a-t-elle pas demandé des engagements fermes des pays du Sud sur la traçabilité des fonds qu’ils reçoivent ? Cette transparence serait le meilleur argument pour que le Nord s’engage plus à leur côté.

La blockchain est une technologie qui permet de tracer l’ensemble des transactions comme nous l’avions expliqué dans notre édito du 27 mai 2021 avec Stéphane Brabant. Qu’attendent les États pour stopper net tous les financements vers le sud dont les destinataires ne s’engagent pas sur cette traçabilité ?

Il faut savoir, par exemple, que le contrôle des changes en Afrique subsaharienne ne permet pas la fin de la fraude fiscale de certains acteurs économiques dont leurs bénéfices disparaissent dans certains centres financiers off-shore comme Macao. Le clan Dos Santos en Angola nous a montré son ingéniosité sur ce point de vue. Le président actuel de l’Angola, João Lourenço, a fort à faire pour récupérer l’argent détourné. Le chanteur connu pour son combat contre la corruption, Luaty Beirão, évoquait déjà dans ses musiques la malhonnêteté du gouvernement de José Eduardo Dos Santos mais à cette époque, rien n’avait été fait par les pays de l’Union européenne ou les États-Unis (nous avons même fait du business avec ce gouvernement), et le chanteur a été très emprisonné pour protestation par le gouvernement alors en place. Il faut bien mesurer les enjeux : cet argent récupéré de la fraude fiscale de l’ancien gouvernement angolais ou les aides au développement non détournées pourraient très bien financer la lutte contre le réchauffement climatique des pays émergents sans aide des pays très riches. La blockchain pourrait être la solution.

Comme nous l’écrivions dans le même édito le 27 mai 2021 : « En Afrique, mais pas seulement, la blockchain, comme outil de bonne gouvernance, peut se mettre au service du respect de nouveaux impératifs, essentiels aux états, aux entreprises, aux populations, aux consommateurs : le respect des droits humains, la responsabilité sociale, éthique et environnementale. »

Cette solution de la blockchain est déjà utilisée dans des pays comme le Ghana. Néanmoins, nous constatons que le gouvernement de Nana Akufo-Addo, indique ne pas avoir les financements nécessaires pour lutter contre le réchauffement climatique et privilégier les marchés volontaires de carbone…

 

Heureusement certains représentants de l’Afrique se disent plutôt optimistes à la sortie de la COP26 à Glasgow, comme le Malien Seyni Nafo, porte-parole des négociateurs des pays africains à la une de RFI. Gageons que lors de la COP27, en Égypte l’an prochain, la compliance sera un enjeu des solutions pour lutter efficacement contre le réchauffement climatique.

 

Michel Taube et Yani Hadar, Expert doté d’une expérience de huit années acquises dans le secteur de la compliance et du contrôle interne (missions dans le financement de projets, l’énergie et le secteur bancaire) et à l’international (France, Luxembourg, Maghreb).

Directeur de la publication