Edito
06H55 - jeudi 30 septembre 2021

Mali, la faute à Macron ? L’édito de Michel Taube

 

Chef d’état-major des armées

Opinion Internationale est très attaché à la présence de la France en Afrique pour lutter contre le djihadisme islamiste, notre ennemi commun, mais pas à n’importe quel prix.

Nous avons attendu le lendemain de l’hommage national rendu hier aux Invalides au caporal-chef Maxime Blasco, mort le 24 septembre en opération militaire au Mali dans le cadre des manœuvres du G5 Sahel, pour rappeler une triste vérité…

En effet, il y a deux jours, à la tribune des Nations unies, et sur RFI et France 24, le premier ministre malien de la transition (partie pour s’éterniser), Choguel Maïga, a annoncé avec fracas et de façon fort peu diplomatique : face au retrait de Barkhane, « nous avons l’obligation de chercher des solutions ».

Certes les velléités du pouvoir malien de recourir aux services onéreux et fort peu regardants à l’éthique de la force Wagner et donc aux autorités russes pour leur confier sa sécurité annoncent des jours pénibles pour le peuple malien. Une vraie hypothèse est que les auteurs du récent coup d’Etat militaire au Mali seraient sur le point de s’allier avec la Russie pour faire coup double : soumettre les forces politiques et la société civile au Mali et se débarrasser en même temps de l’influence trop exigeante à leur goût de la France.

Mais qui a créé le vide dans lequel s’engouffre le premier ministre malien ? N’est ce pas Emmanuel Macron ? La précipitation avec laquelle, à la surprise générale et dans des termes de surcroît très vagues, Emmanuel Macron a annoncé le 11 juin dernier le retrait progressif et partiel de la France de l’opération Barkhane dans la zone des trois frontières a constitué une faute politique majeure. Nous avions dénoncé avec force cette annonce. Je crains que nous commençions à en mesurer les conséquences. Diplomatiques par rapport aux rivalités entre puissances, politiques au vu d’une scène malienne de plus en plus confuse et militaires avec la mise en danger de nos troupes sur place.

Le sentiment anti-français, pour de bien mauvaises raisons entretenues tous les jours sur les réseaux sociaux, gagne du terrain. Les djihadistes continuent à semer la terreur dans une partie du Sahel malgré les victoires militaires du G5. Le Tchad a annoncé lui aussi le retrait de 600 de ses hommes.

Entre temps, le retrait fulgurant de l’armée américaine d’Afghanistan a commencé à avoir des ricochets en Afrique : la confirmation que les Américains s’engageront certes davantage mais qu’en matière de renseignement et nullement en envoyant des troupes suppléer les forces françaises et tchadiennes, tous ces faits n’annoncent-ils pas un prochain retrait des Occidentaux ?

La présence française au Mali et dans le G5 Sahel ne va-t-elle pas devenir de plus en plus difficile ? Qu’en penseront les candidats à l’élection présidentielle en France ? Faut-il lutter contre le djihadisme si loin de nos terres ? Le pourra-t-on encore longtemps ? Telle ne sera peut-être pas la question clé de la présidentielle, bien qu’elle soit intimement liée à celle de notre identité et de la lutte contre notre ennemi djihadiste. Mais la mort de nos 52 héros de la liberté morts au Sahel depuis 2013, sans oublier les centaines de blessés et de mutilés, pour peu que d’autres de nos compatriotes tombent au champ d’honneur d’ici avril 2022, risque fort de hanter l’élection présidentielle.

 

Michel Taube

Directeur de la publication