International
06H14 - samedi 21 novembre 2020

Le geste de la semaine : lécher l’opercule du yaourt !

 

Dans son édition week-end, Opinion Internationale proposera chaque semaine un focus sur un geste quotidien, signifiant, créateur de valeur et de respect.

Le 27 octobre 2020, Danone, leader mondial du yaourt, aurait pu célébrer le 142ème anniversaire de la naissance du médecin bulgare Stamen Grigorov, lequel a eu les honneurs de Google. C’est en effet lui qui découvrit en 1905 la bactérie ultérieurement baptisée Lactobacillus bulgaricus, sans laquelle le yaourt n’existerait pas. Ce micro-organisme est à l’origine de la précieuse (et donc « juteuse ») fermentation lactique, mais aussi de traitements de pathologies aussi graves que la tuberculose ou l’ulcère. L’industrie et le marketing sauront s’approprier les vertus médicinales du yaourt, laissant notamment entendre que s’en délecter jusqu’à la lie, a fortiori s’il est dopé au bifidus, serait un bien meilleur digestif qu’un cognac ou un armagnac en clôture d’un bon repas.

Stamen Grigorov serait donc responsable de l’incrédulité du consommateur devant le rayon yaourt des supermarchés : l’immensité du choix fait tourner les têtes, hésiter, prendre puis poser le pack de quatre, six, ou douze, car l’œil est soudainement accroché par un concurrent au packaging plus accrocheur.

Aujourd’hui, on associe encore le yaourt à la Bulgarie (ah, le fameux yaourt bulgare !), laquelle s’est montrée reconnaissante envers son illustre inventeur, en lui consacrant un musée du yaourt, localisé à Studen Izvor, village natal de Stamen Grigorov.

Le Yaourt serait-il si précieux ? Une enquête révèle que 74 % des jeunes n’en perdent pas une bactérie, récupérant le dépôt sur la face intérieure (heureusement !) de l’opercule, soit par un léchouillage d’une efficacité à en rendre jaloux le plus vorace des toutous, soit en collectant la sainte matière à la cuillère, comme s’il s’agissait de caviar Beluga à 1500 € le pot de 250 grammes (bon, les fêtes de fin d’année approchant, autant glisser au passage cette petite info).

Que signifie ce geste récupérateur, et pourquoi les jeunes seraient-ils particulièrement concernés ? Nous voulions interroger le docteur Sigmund Freud, mais son portable ne répond pas. Il nous faudra donc improviser quelques hypothèses…

L’écologie. Mais oui ! Les jeunes, ce sont tous des Greta Thunberg. Haro sur le gâchis, donc. L’homo sapiens engloutit une quinzaine de milliards de kilos de yaourts par an. Si chacun d’eux ne laissait qu’un gramme de résidu de Lactobacillus bulgaricus sur l’opercule, cela nous ferait 15 millions de kilos de déchets supplémentaires ! Vous n’êtes pas convaincus ? Nous non plus.

L’argent. Épargnons-nous (c’est le cas de le dire) le calcul de la valeur des 15 millions de kilos sus mentionnés, car rapportée au prix du pot de yaourt, la motivation du léchouillage d’opercule doit être ailleurs. Ce serait donc un raisonnement macroéconomique et non microéconomique qui guiderait ce comportement. Toujours pas convaincu ? Nous non plus !

La gourmandise. Mais oui, ne cherchez pas ! Le yaourt, c’est plus un plaisir qu’un médicament. C’est bien plus que du lait fermenté. C’est succulent. Donc, c’est normal qu’on n’en perde pas une miette (ou une goutte).

Toujours pas convaincu ? Là, on ne peut pas faire grand-chose. On va refaire le numéro du docteur Freud, et si on parvient à le joindre, on vous transmettra sa réponse. En attendant, dégustez quelques yaourts et cette réponse, vous la trouverez sans doute vous-même.

Désormais vous ne regarderez plus vos enfants lécher l’opercule de son yaourt préféré comme avant !

Bon week-end (ga)lactique !

 

Michel Taube

 

Merci à Mike qui nous a inspiré cette nouvelle rubrique : le respect, la civilité, la liberté, la fraternité, la civilisation se jouent dans les gestes du quotidien !

 

 

 

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