International
09H05 - samedi 24 octobre 2020

Personnes âgées : Sécurité sociale, une nouvelle branche sans moyens ?

 

Votée en août dernier, inscrite au PLFSS 2021, la réforme sur la dépendance ira-t-elle au-delà de l’affichage d’une nouvelle branche de la sécurité sociale ?

Le rapport de Laurent Vachey, ancien directeur de la Caisse national de solidarité pour l’autonomie (Cnsa) et inspecteur général des finances, remis au gouvernement mi-septembre, préfigure les contours de cette 5e branche. Si le projet est ambitieux dans son architecture administrative, il l’est beaucoup moins quant aux pistes de financement.

Comme cela était prévisible, cette 5e branche sera une CNSA à mission étendue. Elle concernera autant le handicap que l’aide aux personnes âgées. C’est dans les gênes de la CNSA. Si la loi sur la dépendance concerne aussi le handicap, les maigres ressources disponibles n’iront donc pas entièrement au grand âge.

La canicule de 2003 avait justifié l’instauration du lundi de Pentecôte travaillé et de la création de la CNSA. En fait, plus de la moitié de cette nouvelle recette avait permis de financer la prestation de compensation du handicap créé par la loi handicap 2005 voulue par le président Chirac.

Par ailleurs les deux enveloppes de l’assurance maladie « handicap » et « perte d’autonomie », jusqu’ici distinctes dans le PLFSS, seront fusionnées. La pression légitime des associations de personnes handicapées et de leurs familles risque de surpasser celle des personnes âgées, pourtant tout aussi légitime.

L’ambition est désormais de charger cette branche d’autres prestations telles que les pensions d’invalidité et surtout de l’allocation adultes handicapés AAH (montant annuel 10 milliards) aujourd’hui à charge de l’Etat. C’est oublier le caractère universel de ce minima social, au même titre que le RSA et le minimum vieillesse et dont la finalité est d’assurer un revenu minimal à ceux qui ne peuvent pas travailler.

Cette recomposition des responsabilités sera coûteuse en réorganisation administrative et risque d’accoucher d’un éléphant aux pieds d’argile.

Quant au financement, le rapport Vachey est elliptique. Aucun prélèvement obligatoire à la hauteur des besoins n’est envisagé, pour des raisons électorales évidentes.

Par contre, une dizaine de mesures – inventaire à la Prévert – est proposée mais elles ne rapporteraient chacune que quelques centaines de milliers d’euros alors que la mission Libault chiffrait les besoins à 7 milliards en 2024.

 

Les trois conditions de l’équilibre financier

Est-il plus avisé de s’attaquer à des petites niches fiscales que d’instaurer un prélèvement simple et universel à la finalité explicite. Selon l’adage « derrière chaque niche fiscale, il y a un chien », les résistances corporatistes auront raison au moins de la moitié de ces pistes de financement. Les petits ruisseaux ne feront pas les grandes rivières.

Ajouter la dépendance à la protection sociale est opportun à trois conditions : légitimer de nouveaux financements, en présenter clairement la finalité, et assurer une assiette dynamique de financement.

Mais il faut surtout poser les principes de cette protection. Les retraités sont les plus sensibilisés à ce risque (pour leurs parents ou eux-mêmes). Ils doivent en assurer l’essentiel du financement ; soit sur leur revenu soit sur leur patrimoine. Mutualiser ce risque a le même sens que celui de la maladie.

Les biens portants et les plus riches, c’est le fondement de la sécurité sociale, doivent aider ceux qui sont frappés par la perte de leur autonomie.

Si nous cherchons à disposer d’une assiette large, il faut que cette contribution concerne tous les retraités y compris ceux à faibles pensions. Pour éviter la bronca qui avait suivi l’augmentation de la CSG en 2017, le gouvernement devrait offrir en contrepartie une assurance de prise en charge significative en cas de besoins. Cela pourrait être un « voucher » sur une rente qui ne serait perçue qu’après la reconnaissance de l’incapacité à effectuer les actes de la vie quotidienne.

Il faudra aussi que les ressources de cette branche suivent l’évolution des besoins qui, du fait de la démographie, sera d’au moins 3 % par an. Aucune assiette de prélèvements n’augmente à ce rythme, l’évolution de la masse salariale est proche du PIB : désormais elle ne dépassera plus 1 % par an. En revanche, le patrimoine des retraités est considérable au regard de celui des actifs (ils possèdent la moitié du total) et continue à augmenter sous le double effet de la démographie et des prix de l’immobilier. Toute ressource issue de ces immobilisations (droits de succession, recours sur succession…) présenterait le dynamisme nécessaire tout en « liquéfiant » un capital dormant, ce que de nombreux économistes appellent de leurs vœux.

Enfin la perte d’autonomie ne peut pas faire uniquement l’objet de la solidarité nationale. La solidarité familiale est à préserver : mobiliser, quand c’est possible, ces bijoux de famille pour assurer une digne fin de vie à nos ainés serait une manifestation concrète de cette solidarité.

 

François Jeger

Co-fondateur de l’Institut Chiffres & Citoyenneté

 

 

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