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16H41 - mardi 4 février 2020

Propriétaire à Paris ? Benjamin Griveaux pirate le business model d’une start-up française. L’édito de Michel Taube

 

Après l’utopie collective, le rêve individuel. Après le presque grotesque, le plagiat total. Après Central Park gare de l’Est, voici une idée géniale (en apparence) pour relancer l’accès des Parisiens à la propriété… Sauf que Benjamin Griveaux, en l’exposant dans Le Parisien dimanche du 2 février, l’a piquée, mot par mot, exemple pour exemple, à deux chefs d’entreprise français en pleine levée de fonds, eux-mêmes inspirés du Canada.

Bernard Griveaux décoche sa solution logement à la une du Parisien (photo Jean-Baptiqte Quentin) le 2 février.

 

Benjamin Griveaux, en perte de vitesse dans la course à la Mairie de Paris, perd-il les pédales (pas celle des vélos chers à Anne Hidalgo) ? En tout cas, ses promesses sont de plus en plus surprenantes et même déroutantes : hier, on devait raser (pardon, déplacer) la gare de l’Est, comme s’il s’agissait d’un Lego, au bénéfice d’un Central Parc parisien. Ben voyons. Sans se concerter avec la SNCF ni les habitants. Pas cher et vite fait, bien sûr !

Aujourd’hui, le bébé-Macron récupère la hotte que le père Noël a soigneusement rangée jusqu’à décembre prochain, pour la remplir du plus beau cadeau dont rêvent les Parisiens : l’accession à la propriété. Car malgré le bas niveau actuel des taux d’intérêt et des salaires globalement plus élevés à Paris qu’en région, les prix de l’immobilier sont un obstacle rédhibitoire à ce sésame social pour de nombreux foyers, résignés à rester locataires ou à quitter Paris.

L’idée de Benjamin Griveaux, du moins celle dont il s’approprie la paternité, est d’augmenter l’apport de l’accédant à la propriété d’une somme de 100.000 euros, sans grever, pense-t-il, les finances publiques parisiennes. 

Résultat : soit le montant du prêt bancaire de l’accédant serait réduit, soit il pourrait viser plus grand ou mieux avec le même prêt. De quoi « s’offrir une chambre de plus pour bébé ». Et comment ? En mettant la collectivité locale en position d’investisseur prenant des parts dans le projet immobilier de l’accédant, la Ville récupérerait sa mise avec bénéfice, sous forme de plus-value lors de la revente, plafonnée « autour de 20 % du prix du bien ». L’investissement initial de la ville de Paris serait de deux milliards pour 20 000 logements sur un quinquennat.

 

Un plagiat grossier qui met en difficulté deux chefs d’entreprise en pleine levée de fonds

Sauf que cette idée séduisante, ce n’est pas Griveaux qui l’a conçue, ni son équipe de campagne. C’est une Fintech de 30 collaborateurs (déjà !) qui, d’après nos informations, a découvert dimanche que son business model était dévoilé à la une d’un grand quotidien par un homme politique à l’appétit peu partageur…

Benjamin Griveaux a purement et simplement « emprunté » l’idée à une start up, jusque dans ses moindres détails sans la mentionner évidemment (grande spécialité des politiques de l’ancien monde !). Nous ne pouvons qu’inviter le lecteur à visiter le site de la startup Virgil (https://www.wearevirgil.com/) ou à lire l’interview que son cofondateur Keyvan Nilforoushan avait accordée à Moneyvox le 19 décembre 2019. Rendons à César ce qui revient à César et faisons-lui un peu de la publicité que le candidat En Marche a juste oublié de lui faire.

Comment le candidat et/ou le staff du parti du Président a-t-il pu être aussi naïf pour penser que ce véritable plagiat, par ailleurs très préjudiciable à une entreprise jeune, innovante et dont le projet présente une véritable dimension sociale, resterait inaperçu ? Certes, les idées appartiennent à tous, et ne sont pas brevetables. Mais d’une part, ce n’est pas seulement l’idée que s’est approprié Monsieur Central Park, mais la méthode et les détails : le montant de l’aide, la technique de la prise de participation, la récupération lors de la revente, les termes même de la communication en parlant de « la chambre de l’enfant en plus ».

La faute de Benjamin Griveaux est morale, car la moindre des choses eut été de se référer à l’initiative de la Fintech Virgil, de lui proposer de l’y associer. Peut-être auraient-ils refusé… D’où le plagiat ?

A l’étranger, des mécanismes d’aide publique à l’acquisition immobilière existent déjà, en particulier au Canada, pays auquel Benjamin Griveaux fait d’ailleurs référence sur son site internet de campagne. Sauf qu’en l’espèce, il s’agit d’une initiative du gouvernement fédéral, et non de celle d’une municipalité. Par ailleurs, les modalités de cette aide sont sensiblement différentes de celles proposées par la société Virgil.

 

L’erreur technique de Griveaux qui risque de coûter des milliards aux Parisiens

A cette faute morale s’ajoute une forme d’incompétence : la progressivité de la mise en place du mécanisme d’aide à l’accès à la propriété proposée par la start-up Virgil ne comporte pas de risque d’inflation artificielle des prix, au contraire de sa généralisation massive proposée par Benjamin Griveaux.

En effet, si l’idée peut paraître séduisante, elle se heurte toutefois à un petit bémol…

Comme chacun sait, la nature, même financière, a horreur du vide. Si le rapport entre l’offre et la demande dans la plus petite (en superficie) des plus prestigieuses métropoles du monde ne peut que pousser les prix vers le haut, la baisse des taux d’intérêt y a également contribué. Une généralisation du coup de pouce à 100.000 balles peut donner des idées aux vendeurs et à tous les professionnels de l’immobilier, tout comme les aides aux logements tendent à augmenter les prix des loyers (c’est papa qui paye la différence !).

En revanche, une application plus ciblée et progressive de ce projet, comme le propose Virgil, pourrait avoir une incidence positive sur l’accès à la propriété, sans susciter une flambée des prix qui en anéantirait les effets bénéfiques (pour l’accédant !).

 

Une fausse bonne idée à l’échelle de toute une ville

En transformant, par le biais d’un grossier plagiat, une bonne idée, peut-être une grande idée, en dette de deux milliards d’euros pour le contribuable parisien, Benjamin Griveaux ne va pas redorer son blason ni rétablir sa crédibilité.

Ce dernier met aussi en difficulté une entreprise qui avait réussi une première levée de fonds, avec d’illustres inconnus comme Xavier Niel.

Il se dit que les fondateurs de Virgil, Keyvan Nilforoushan et Saskia Fiszel, sont en colère et pourraient ne pas laisser passer ce préjudice.

Le candidat LREM, visiblement en panique, car désormais devancé dans les sondages par Rachida Dati, continue sur un chemin de traverse qui risque vite de dérailler.

Les Parisiens seront contents de la gouvernance de la capitale que nous prépare Griveaux !

 

Michel Taube

Directeur de la publication

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