Haïku
08H28 - mercredi 18 septembre 2019

Haïku d’été par Olivier Peraldi

 

 

 

Été 8/12

parapluie volé

en sortant du konbini

chaude pluie d’été

 

 

Les haïkaï (haïku au singulier) expriment l’excellence de la poésie japonaise. En 17 mores (son élémentaire phonétique), en un verset composé strictement en trois segments 5-7-5, calligraphié sur trois lignes en français (une ligne verticale en japonais), chaque haïku tente d’exprimer la quintessence de l’être, d’un état, parfois d’une actualité.

Les haïkaï rythment généralement les saisons.

Le poète Olivier Peraldi nous donnera à lire chaque dimanche matin un haïku de sa création à la une d’Opinion Internationale. Du pur bonheur !

[caption id="attachment_56902" align="alignleft" width="300"] © Baptiste Hamousin[/caption]

 

Olivier Peraldi a publié, entre autres, l’ouvrage Ombres & Couleurs ou le voyage du Corbeau d’Arcimboldo au Mont Fuji aux Editions Caractères. Sa dernière publication : L’An Jeune, une œuvre à laquelle sont associés le musicien Filbö et le plasticien Richard Ferri-Pisani, qui entremêle poésie, musique et art graphique.

Grâce à ces haïkaï, Opinion Internationale porte bien son nom dans cette nouvelle rubrique qui rapproche Japon et francophonie.

Le premier haïku d’Olivier Peraldi serait-il un clin d’œil aux gilets jaunes ?

Michel Taube 

 

 

 

Précédents haïkaï :

 

Hiver 1/12

soleil d’hiver

un rond-point dans la brume

quel chemin prendre 

 

Hiver 2/12

le vent se lève

l’année qui naît dort encore

loin des promesses

 

Hiver 3/12

la neige attendue

les enfants se poursuivent

maître bienveillant

 

Hiver 4/12

une question me vient

rien d’autre qu’innocence

flocon dans le vent

 

Hiver 5/12

sommets enneigés

l’être aimé languit au bain

chaleur d’étuve

 

Hiver 6/12

l’essence a gelé

son mat du jerrican

l’hiver fait son show

 

Hiver 7/12

foulant la poudreuse

sans ailes et sans intrigue

oh je m’envole

 

Hiver 8/12

là-haut une trace

branche poudrée de neige

le thé infuse

 

Hiver 9/12

mais où est l’hiver

voie lactée domestiquée

diodes d’insomnie

 

Hiver 10/12

 les arbres chétifs

veillent la croisée close

le vieux va mourir

 

Hiver 11/12

le pas incertain

à la suite du torrent

vifs reflets d’argent

 

Hiver 12/12

modestes bouleaux

j’écris sur vos parchemins

jours silencieux

 

Printemps 1/12

réveil en sursaut

le premier chant du printemps

arrivé si tôt

 

Printemps 2/12

ombres glissantes 

sous la porte encore fermée

le chat s’étire

 

Printemps 3/12

ô rayon naissant

même les poussières singent

la joie de vivre

 

Printemps 4/12

le maître de chant

espère encore quelque accord

généreux prunier

 

Printemps 5/12

formidables tours

nuageux torticolis

surtout vues d’en bas

 

Printemps 6/12

la main incertaine

trois sakura sur le cœur

l’amour peut-être

 

Printemps 7/12

le jour décline

au bain de fleurs de prunier

l’être aimé languit

 

Printemps 8/12

ils vont deux à deux

lune et reflet de lune

pluvieuse veillée

 

Printemps 9/12

assis au jardin

ils ne virent rien du deuil

du village clos

 

Printemps 10/12

là-bas le jardin

l’escargot sur la vitre

sa peine éperdue

 

Printemps 11/12

l’ombre du prunier

m’accueille moi l’étranger

c’était donc si simple

 

Printemps 12/12

soleil déclinant

l’autoroute est encombrée

tu ne viendras pas

 

Été 1/12

souple bananier

la palme frôlant le vent

l’être aimé sommeille

 

Été 2/12

jarre dans l’entrée

aux lents poissons désœuvrés

l’eau fraîche d’été

 

Été 3/12

le pas incertain

quittant l’allée des pivoines

soudain la chaleur

 

Été 4/12

en ce soleil du

six août deux mille dix-neuf

je recherche l’ombre

 

Été 5/12

recompter encore

les six cent quarante-quatre

grues de Sadako

 

Été 6/12

sixième nuage

à se grimer en serpent

je marque une halte

 

Été 7/12

le vent bleu d’été

tu le crois dans ma chambre

mouche vrombissante