International
14H38 - lundi 17 octobre 2016

Le service public face aux enjeux de modernisation

 

A l’heure où les enjeux de modernisation des services publics sont plus que jamais d’actualité, le Cercle de la réforme de l’État, en partenariat avec Acteurs publics et Opinion Internationale, organise un colloque le 20 octobre 2016 à Paris sur « Quel service public demain ? ».

Quel service public demain ? Le service public, dans bien des domaines, est à la peine. Et dans le même temps, les Français le ressentent parfois en décalage par rapport à leurs attentes.

Il semble pris dans un faisceau de difficultés. L’Etat ne peut par exemple plus décider seul de façon unilatérale ou hiérarchique et selon sa propre temporalité : la société civile et les agents publics veulent être parties prenantes de la décision, et les réseaux sociaux influent presque instantanément sur les projets.

Il subit une crise de légitimité symbolique. Dans un pays où il a souvent donné sens et vision à la société, on attend plus que jamais de lui qu’il soit le gardien de la cohésion sociale et de la cohésion nationale. Est-il absent ou défaillant, tous les replis identitaires ou autres deviennent possibles.

Le service public est de plus inséré dans le processus de la construction européenne, qui met en cause ses modes de fonctionnement mais aussi encadre ses possibilités de réaction aux attentes des citoyens, sans pour autant diminuer la demande d’Etat.

La France est confrontée à une crise quasi-générale de la crédibilité des institutions alors même que le service public doit être davantage performant et ne doit sacrifier ni la qualité de service ni les valeurs d’impartialité, de continuité et d’adaptabilité qui sont les siennes. Cette crise est d’autant plus frappante que se multiplient les actions innovatrices venues du terrain et se tissent des comportements nouveaux, à la fois créatifs et proactifs.

Le modèle le plus général demeure celui d’un service public qui applique des objectifs selon un modèle descendant, des décideurs vers les metteurs en œuvre, sans recueil préalable suffisant des informations de terrain. Or ce système de pensée, ou cette culture administrative, paraît obsolète à un moment où malgré la lassitude des réformes, de nombreuses initiatives existent.

En effet, on ne décourage pas si facilement des cadres et des agents publics qui aspirent à une rénovation du service public. Mais ces initiatives demeurent isolées et non capitalisées ; les fonctionnements en réseaux passent par le centre des administrations. Les potentialités ouvertes par le numérique ne sont pas mises à profit, ou trop peu, pour échanger plus librement, faire circuler l’information, développer l’intelligence collective.

L’Etat est soumis à des mouvements exogènes comme la diversité croissante des attentes sociales avec des aspirations clivées entre, d’une part, des groupes sociaux à la fois plus multiples et plus soudés et, d’autre part, des individus dont les attentes sont plus complexes et parfois non réductibles à l’image que l’on se fait de groupes sociaux aux comportements prévisibles.

L’Etat doit faire face à la fois, d’une part, à une globalisation et à une massification croissantes et, d’autre part, à un individualisme qui s’exacerbe. Il est pris en tenaille par le haut (globalisation) et par le bas (aspirations de la société civile à des réponses plus individualisées). Des « fonctionnaires de base » doivent faire face à ce besoin d’individualisation parfois en enfreignant les règles pour trouver des solutions « humaines »et adaptées. Ils le font sans que trace soit gardée des pratiques et sans que soit capitalisés les bonnes pratiques et les échecs, pour éclairer l’évolution du cadre réglementaire d’intervention.

En réalité, des divergences existent entre les agents publics : le uns pensent que l’intérêt général est leur apanage, les autres, que l’intérêt général se co-construit avec les citoyens.

Une difficulté supplémentaire tient à la faiblesse fréquente du management, avec une évaluation des agents publics trop souvent formelle, une insuffisance de la formation au moment des réformes, trop peu de confiance aux cadres intermédiaires et aux agents, une quasi-absence de plans objectifs/moyens contractualisés avec l’autorité hiérarchique supérieure.

Fondamentalement, l’Etat et plus largement le service public, sont les gardiens du vivre ensemble : ils doivent en garantir la possibilité. Que faire alors ? Avoir un service public connaissant mieux la société, les groupes sociaux, la diversité des situations, l’entreprise, plus en prise avec ces attentes et les traduisant dans l’action publique. La difficulté est de savoir comment connaître les attentes sociales, et de quel type de prise en compte il s’agit. Le modèle actuel de l’Etat où les fonctionnaires ne sont souvent que des exécutants, ou considérés comme tels, doit être remplacé par un Etat animé par une nouvelle dynamique, un Etat en réseaux où chacun peut faire valoir son apport, faire entendre sa voix, sans nécessairement l’autorisation du centre. Le système gagnerait alors en intelligence par la multiplicité de ceux qui, à tout niveau, permettent de l’animer et le font progresser.

Dans ce nouveau modèle, la conduite du changement revêt un caractère crucial : investir dans les conditions de mise en œuvre, dans l’expérimentation, dans l’évaluation comme outils d’intelligence collective apparait de plus en plus comme une condition majeure pour un service public efficace et en phase avec la société.

Le passage à un véritable management par le sens et, à cette fin, la refondation pédagogique de la formation professionnelle initiale et continue des fonctionnaires, constituent deux maîtres-piliers des évolutions nécessaires.

Si, par exemple, des services déconcentrés ont subi une perte de professionnalisme, c’est en certains cas en raison de la fusion des structures mais aussi du fait de l’absence de prise en compte de la dimension managériale et d’une gestion des ressources humaines imparfaite et parfois inapte à donner des perspectives aux agents.

Les questions à ouvrir, c’est alors : comment connaître la société ? Comment prendre en compte ses attentes et dans quelles limites ? Comment co-construire l’intérêt général ? Comment assurer ce « vivre ensemble » dont l’Etat est le garant ? Faut-il des fonctionnaires généralistes ou des fonctionnaires plus pointus, à même de suivre et d’anticiper les évolutions technologiques et de métier et faire à la globalisation ? Comment rendre compatible l’attente sociale de services publics et les contraintes des finances publiques ? Comment aborder ce thème, sachant que certaines administrations demeurent surdimensionnées tandis que d’autres services sont paupérisés ?

Le service public de demain, celui dont nous voulons, sera alors un service public diversifié dans ses modes de recrutement et de formation, rénové dans ses modes de management, ouvert à la société civile, sachant co-construire l’intérêt général, favorisant le lien social au quotidien.

 

SYLVIE TROSA ET CHRISTIAN BABUSIAUX, vice-présidents du CERCLE DE LA REFORME DE L’ETAT   

 

Programme et inscription : http://cerclereformeetat.eu/

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