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17H15 - mardi 29 septembre 2015

Dominique de La Garanderie : « Ces talents issus de la diversité doivent profiter de l’ascenseur social »

 

 

Ancienne et première femme Bâtonnier de Paris, Dominique de la Garanderie est une grande spécialiste du droit social. Professionnelle engagée et humaine, elle a remis le 5ème « Prix Sciences Po – La Garanderie Diversité et Talents » à Nourhane Benamira le 24 septembre 2015, en partenariat avec l’Ecole de droit de Science Po Paris.
Nourhane Benamira, lauréate 2015 du « Prix Diversité et Talents », est actuellement en deuxième année de Master de Droit économique à l’Ecole de droit de Science Po. Elle a pour objectif de devenir avocat spécialiste en droit social.

Attorney Dominique de la Garanderie is a member of the Paris Bar, specializing in administrative law, litigation, commercial litigation, Criminal Business, criminal law, Employment Law, company law and international criminal law. Paris, FRANCE-07/05/12.

Dominique de La Garanderie


Comment est né le prix « Diversité et Talents » il y a cinq ans ?

Au départ, c’est une initiative de Science Po destinée aux étudiants qui bénéficient de la Convention d’éducation prioritaire, dispositif qui permet d’élargir la diversité sociale de l’institution.

Nous intervenons au niveau du Master 2 lorsque les bourses sont insuffisantes pour continuer les études. Le prix « Diversité et Talents », doté de 5.000 euros, leur permet d’aller au bout de leurs études. S’il n’y a eu que des lauréates pour le moment, le prix est ouvert à tous les étudiants dans la filière économique et juridique de Science Po. Cependant, cette féminisation du Prix est pour partie liée au fait que les filles y sont plus nombreuses (59%) que les garçons. La plupart de nos lauréates étudiantes se préparent au métier d’avocat. Au-delà de la bourse accordée, les étudiants peuvent constituer un réseau professionnel lors de la remise du prix. Évidemment, nous ne les perdons pas de vue et si nous pouvons leur venir en aide, nous le faisons.

Que veut dire pour vous « diversité » ? Vous visez la diversité culturelle, l’égalité hommes – femmes, les conditions sociales ?

Le Prix retient les critères de Science Po, qui sélectionne des jeunes femmes et des jeunes gens issus de milieux défavorisés. Le symbole de la diversité est là : il s’agit d’une diversité sociale. Il n’y a aucune discrimination de sexe. S’il est vrai que nous n’avons pour le moment remis ce prix qu’à des jeunes femmes, elles ne le doivent qu’à leur mérite. Elles étaient les meilleures ! Nous tentons de rééquilibrer le facteur économique même si elles risquent d’être confrontées, de par leur talent, au plafond de verre.

Auriez-vous aimé recevoir ce prix ?

J’aurais adoré parce qu’il s’agit d’une réelle reconnaissance du mérite. Notre prix renouvelle modestement cette idée républicaine selon laquelle on peut bénéficier de l’ascenseur social. Quand nous examinons les dossiers, nous constatons que ces jeunes femmes s’intéressent toutes aux autres, à l’humain et donnent de leur temps personnel dans des associations. J’aurais été très fière qu’on me reconnaissance pour ces talents-là surtout à leur âge.


Vous avez été la première femme Bâtonnier de Paris. La profession d’avocats en France souffre-t-elle du syndrome du « plafonds de verre » (peu de femmes dans les hautes fonctions de pouvoir) ?

L’observation permet de dire que, dans les grands cabinets, les femmes ont encore peu de place comme associée. Si les choses s’améliorent, comme partout, elles sont encore bien loin d’avoir la place qu’elles méritent. La distribution des dossiers à « haute plus-value économique » dans ces mêmes cabinets va plus facilement aux hommes.

Pour autant, dans notre profession, il existe un moyen formidable de ne pas se heurter au plafond de verre : créer sa structure. Chacun et en l’occurrence chacune a sa chance dans cette profession, il faut la saisir.

Votre associé Frédéric Sicard prendra ses fonctions de Bâtonnier de Paris au 1er janvier 2016. Quelles sont selon vous les qualités nécessaires pour exercer un bon bâtonnat ?

Il faut, je crois, une douce autorité. Le Bâtonnier doit veiller à l’application de la réglementation de la profession d’avocat du jour où l’avocat prête serment jusqu’au jour où il quitte ses fonctions. Tous les actes d’un avocat sont suivis par l’Ordre. Une autorité doit exister pour maintenir la règle déontologique dans son axe. Mais le Bâtonnier doit aussi avoir le sens inné de la confraternité et de l’écoute attentive : il se doit de comprendre les difficultés de la vie professionnelle de ses confrères. Il faut donc à la fois beaucoup d’humanité et une autorité solide.


Le Premier ministre, Manuel Valls, a annoncé vouloir un code du travail plus souple. Qu’en pensez-vous ?

C’est indispensable ! Souvenez-vous de l’ancien dicton « Quand Renault éternue, la France tousse », nous avons été longtemps sur ce schéma social issu de l’activité industrielle. Ceci dit, lorsque nous édictons de nouvelles législations, la souplesse est indispensable : les dispositions ne peuvent pas être identiques pour les TPE, les PME ou les multinationales. Le droit du travail doit s’adapter à la réalité de notre tissu d’entreprises et non l’inverse, c’est-à-dire, un droit de travail rigide et donc inadapté.


Robert Badinter et Antoine Lyon-Caen viennent de cosigner
Le travail et la loi, essai qui propose de ramener le Code du Travail à dix articles. Qu’en pensez-vous ?

Dix articles ? J’en doute. Le système qui consiste à prioriser le dialogue social et les accords d’entreprise, c’est la bonne voie. Sur le plan technique, il reste des quantités de questions à résoudre. Il faudrait déjà modifier les mentalités. Il s’agit selon moi d’une piste visant à rappeler les grands principes du Code du Travail.

Antoine Lyon-Caen est le digne fils de son père Gérard Lyon-Caen : ils furent les artisans (spécialement Gérard Lyon-Caen) de la « sédimentation juridique » en droit du Travail. Ils représentent toute une école de professeurs de droit qui considérait qu’il était bon d’ajouter des dispositions nouvelles les unes aux autres comme autant d’améliorations et d’accumulation d’avantages qui ne pouvaient être que favorables pour le monde du travail. A notre époque et à ce niveau, il faut détricoter tout cela et ce n’est pas facile.

L’essentiel est néanmoins complexe : le dialogue social, les discussions dans les entreprises posent aussi la question de la représentativité syndicale et donc d’une réorganisation profonde, décisive pour avoir un dialogue social gagnant – gagnant dans le respect aussi des contrats individuels.

Propos recueillis par Stéphanie Petit

ecole-de-droitPerçue au départ – et encore aujourd’hui, comme un trublion à côté des Facultés de droit dans les formations aux métiers juridiques, l’Ecole de droit de Sciences Po Paris, dirigée par Christophe Jamin, a fait ses preuves. En sortent souvent des avocats et des juristes qui ont peut-être une approche du droit moins technicienne que leurs confrères des universités de droit, mais qui en sortent avec un sens pragmatique et à la fois politique qui leur permet de devenir de futurs juristes redoutables.

Journaliste

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