International
10H01 - mercredi 13 mai 2015

Grèce : le gouvernement Tsipras en panne de pragmatisme ?

 

 

Alexis Tsipras et son gouvernement, majoritairement de gauche radicale, vont devoir arbitrer rapidement entre la poursuite d’une politique idéologique, insoutenable, et la mise en place d’une politique pragmatique et volontariste, qui passe nécessairement par des privatisations.

 

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source : http://greece.greekreporter.com

 

Cent jours et rien n’a bougé en Grèce. Depuis qu’il a accédé au pouvoir, le 25 janvier dernier, le gouvernement d’Alexis Tsipras, l’idylle de la gauche radicale, n’a, malgré quelques effets d’annonce, pas fait avancer le schmilblick hellène. Pire, la péninsule se retrouve même plus isolée qu’avant, entre des créanciers qui s’impatientent légèrement et des partenaires – Etats membres – qui ne savent plus s’ils doivent soutenir ou non leur voisin grec. Un voisin qui tarde à mettre sur pieds un plan de redressement de ses finances, tandis que sa dette est toujours aussi insoutenable – plus de 170 % du PIB.

 

 

Trois mois d’attentisme

C’est pourtant ce que s’était promis de faire Alexis Tsipras en accédant au pouvoir, il y a trois mois. Preuve de la bonne volonté grecque : aussitôt élu, le Premier ministre et son – médiatique – ministre des Finances, Yanis Varoufakis, avaient entamé un succinct tour d’Europe afin de discuter restructuration de dette et aides financières. Celles-ci étant subordonnées à la mise en place de réformes par le gouvernement Tsipras, dont l’Union européenne (UE) – la Banque centrale européenne (BCE) notamment – et le Fonds monétaire international (FMI) ne voient toujours pas la couleur. Courant février, après plusieurs réunions de l’Eurogroupe – rassemblement des ministres des Finances de la zone euro –, un accord est pourtant trouvé sur l’extension du programme de financement de la Grèce ; le 27 mars, la liste de réformes présentées en échange ne convainc guère les argentiers européens. C’est finalement la Commission européenne qui, à la suite d’énièmes tractations, estime que le gouvernement hellène ne fait pas assez d’efforts. Une date buttoir tombe : il a, avec ses créanciers, jusqu’au 11 mai pour finaliser un accord sur le remboursement de la dette du pays, afin de toucher la dernière tranche de prêts de la part de l’UE – 7,2 milliards.

L’irritation des institutions et de certains Etats membres européens s’explique aisément par l’attentisme dont fait preuve Alexis Tsipras dans le dossier. Certains allèguent volontiers le mandat démocratique qu’il a reçu du peuple grec le 25 janvier dernier ; Syriza devrait ainsi s’occuper en priorité de la revalorisation des salaires plutôt que du remboursement de la dette. Cette question n’est autre que celle des légitimités qui s’affrontent – celle des urnes grecques contre celle des traités européens. Sauf que l’Etat que dirige aujourd’hui la formation radicale de gauche s’est engagé au sein d’une communauté d’Etats avec ses propres règles, qu’il convient d’honorer. « L’objectif n’est pas de faire de l’assistanat permanent, selon Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France. Ça n’aurait aucun sens qu’on dise que pendant les vingt ou trente… prochaines années, on va faire un chèque à la Grèce pour payer ses fins de mois », poursuit-il. L’image, volontairement simpliste, a le mérite de la clarté : les Etats membres, dont certains sont moins bien lotis, refusent de payer pour un pays dont les politiques sont, au mieux, inefficaces, au pire, frivoles.

 

 

La Grèce sur le chemin de la privatisation

D’autant que les leviers existent bel et bien en Grèce. Deux secteurs, notamment, sont susceptibles de créer de la valeur – et faire baisser le chômage, qui s’élève aujourd’hui à 26 % – tant ils représentent le cœur d’activité du pays : le tourisme et la construction navale, « les deux principales sources de revenus en Grèce » d’après Anthony Zolotas, directeur général d’Eurofin, groupe de conseil spécialisé en investissements. Ce dernier d’ajouter que les deux secteurs, non seulement, font partie des plus gros employeurs du pays, mais qu’ils pourraient accroitre le niveau d’activité en pourvoyant bien plus de postes qu’actuellement. Une solution vers laquelle pourrait se tourner Alexis Tsipras, qui annonçait dans son programme électoral vouloir créer quelque 300 000 emplois – public, privé et social confondus – tout en augmentant le revenu minimum et en octroyant divers avantages aux salariés. Le Premier ministre aura appris à ses dépens qu’on ne gouverne pas de la même manière que l’on fait campagne ; le recours à la sphère privée semble dès lors inéluctable.

Sauf que la pierre d’achoppement, aujourd’hui, est avant tout idéologique. La gauche radicale au pouvoir ne souhaite pas entendre parler de privatisations… tout comme François Hollande pointait le monde de la finance du doigt avant d’être élu en 2012. Un sursaut de pragmatisme est dès lors vivement attendu de la part d’Athènes, d’autant plus qu’au fil de la campagne législative, le propos de Syriza, au départ ultra-radical, est petit à petit devenu lisse et « mainstream ». Plus question de sortir de l’euro ou d’effacer la dette ; le Premier ministre s’est « converti », d’une certaine manière, à la réalité du pouvoir. Les réalités économiques et financières, quant à elles, ce sont ces investisseurs internationaux qui sont prêts à franchir les frontières hellènes, mais qui, faute de conditions d’accueil favorables, préfèrent s’abstenir. Ainsi des capitaux étrangers sont-ils disponibles, notamment dans le secteur minier et aéroportuaire ; le gouvernement, pourtant, maintient son hostilité. 

En 2013, un ambitieux programme de privatisations avait été mis sur les rails par la précédente majorité, après de longues années de pourparlers avec les créanciers de la Grèce. Tandis que l’histoire se répète aujourd’hui, Alexis Tsipras devra très vite trancher entre l’application – déraisonnable – de son programme électoral et une politique volontariste de sortie de crise, qui passe notamment par ces privatisations. Vendredi 24 avril, son gouvernement réalisait d’ailleurs sa première opération de la sorte, en cédant les droits des paris hippiques à une société greco-tchèque. A défaut d’être épique, la décision n’en demeure pas moins un bon début.

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