A l’occasion de la journée mondiale contre la peine de mort, nous nous penchons sur le cas de la Chine. L’exécution du vendeur de rue Xia Junfeng a suscité beaucoup d’émotion dans le pays et à travers les réseaux sociaux. Condamné et exécuté pour avoir tué deux policiers, il avait expliqué avoir agi en légitime défense. Pour autant, on constate depuis 2011, une baisse du nombre d’exécutions.
Le 25 septembre dernier, après la condamnation à la peine de mort par la Cour populaire suprême chinoise, Xia Junfeng a été exécuté sur le champ. Xia était vendeur de rue. Il y a deux ans, dans un conflit avec les « chengguan » (policiers chargés du maintien de l’ordre dans les villes chinoises), il s’était auto-défendu et avait tué deux policiers. Il faut savoir que ces « chengguan » ont une mauvaise réputation en Chine pour la violence et pour leur non respect de la loi.
La peine de mort, un sort réservé pour les pauvres ?
À l’occasion de la journée Mondiale contre la peine de mort, l’exécution de Xia Junfeng suscite un nouveau débat en Chine : faut-il abolir la peine de mort ? Le cas de Xia Junfeng suscite un débat dans la société chinoise car son application semble se faire à géométrie variable, selon que l’on soit puissant ou non.
A la différence de Xia Junfeng, Bo Gu Kailai, l’épouse de l’ancien haut dignitaire du Parti communiste, Bo Xilai, qui avait tué un homme d’affaires britannique, a été condamné à la peine de mort avec une peine suspensive, ce qui veut dire qu’elle échappera à la peine capitale, pourvu qu’elle ne commette pas de nouveaux crimes. Chaque année, les cas de « chengguan » qui battent des vendeurs à mort sont nombreux, mais jamais un policier n’a été condamné.
Ces dernières années, on a constaté que la pratique était en baisse. Depuis le 1er mai 2011, la Chine a en effet réduit le nombre des crimes passibles de peine de mort de 68 à 55. C’est la première fois que la Chine réduit le nombre de sentences capitales depuis la promulgation du code pénal en 1979. Dans la pratique judiciaire, la plupart des exécutions sont pratiquées pour meurtre, braquage, ou trafic de drogue. En 1997, dans un effort de prise en considération des droits de l’Homme, la Chine a introduit l’injection létale, afin de minimiser la douleur et d’éviter la défiguration des condamnés.
En effet, par une conception idéaliste, le Parti communiste était en faveur de l’abolition de la peine de mort avant l’établissement de la République populaire de Chine, et il l’est a priori aujourd’hui par crainte que des tragédies comme celles de la Révolution culturelle et d’autres événements politiques de l’histoire chinoise ne se reproduisent.
Hong Kong et Macao exempts
« Prévenir l’abus de la peine de mort » est une des lignes directrices des juges. Selon un document de 1922 du Parti communiste, l’abolition de la peine de mort constitue l’un des objectifs du parti. Cette phrase a été réitérée en 1956 dans le discours de Liu Shaoqi, alors vice-président de la Chine. En 1988, la Chine a signé le Pacte national relatif aux droits civils et politiques, en promettant d’appliquer la peine de mort seulement « aux crimes extrêmement graves ». La cour populaire suprême chinoise a récupéré le droit d’approbation de la peine de mort afin de réduire le nombre d’exécutions.
Avec la formule « un pays, deux systèmes », le système judiciaire est différent à Hong Kong et à Macao où la peine de mort est depuis longtemps abolie. À Macao, la peine la plus sévère est de 25 ans de prison.
Une opinion publique réticente à l’abolition
Malgré l’attitude officielle favorable à l’abolition de la peine de mort, l’opinion publique en Chine n’est pas tolérante sur cette question. Selon un sondage du bureau national des statistiques, plus de 95% des personnes en Chine continentale, et presque 80% à Taiwan, sont contre l’abolition de la peine de mort.
On constate qu’en Extrême-Orient, aucun pays n’a aboli la peine de mort. La logique du règlement de compte « œil pour œil, dent pour dent » joue encore un rôle important dans la mentalité des habitants en Chine, ainsi que dans les pays aux alentours, qui sont très influencés historiquement par la Chine. Les fonctions sociales de la peine de mort, telles que l’effet dissuasif et l’isolement des criminels, sont également approuvées par l’opinion publique.