Tunisie
03H11 - vendredi 8 février 2013

Dissolution du gouvernement Jebali : la réaction des partis politiques

 

Le soir même de l’assassinat de Chokri Belaïd, le premier ministre tunisien, Hammadi Jebali, annonçait par surprise la dissolution du gouvernement de la troïka, formé en décembre 2011 après les premières élections de la Tunisie libre. Cette annonce survient après l’échec de la tentative de remaniement du 25 janvier. Elle vise avant tout à absorber le choc provoqué par cet assassinat du leader politique de gauche. Les réactions au sein du paysage politique tunisien sont très partagées. Panorama.


Hammadi Jebali, Premier ministre tunisien © European Parliament

 

Les violations de la procédure légale

Suite à la décision prise hier par le Premier ministre Hammadi Jebali, de dissoudre le gouvernement, plusieurs experts en droit tunisien, tel que Sadok Belaid et Kais Said, ont confirmé l’illégalité du procédé. Hammadi Jebali n’aurait pas le droit de renouveler tous les membres de son gouvernement sur une décision unilatérale, sans consulter l’Assemblée Nationale Constituante (ANC).

Les juristes ainsi ont souligné que le chef du gouvernement aurait ainsi auparavant dû présenter sa démission au Conseil constitutionnel ou au président de la République, Moncef Marzouki, ces derniers l’appelant par la suite à former un nouveau gouvernement, confirmé par le vote de l’ANC.

La décision de Jebali n’est par conséquent pas encore légale et c’est ce qui a notamment suscité de vives réactions. Rappelons que Hammadi Jebali a annoncé cette initiative, hier soir, afin de parer à la crise politique que connaît la Tunisie depuis l’assassinat hier de Chokri Belaid, une figure de l’opposition de gauche.

 

Ennahdha : l’annonce, révélateur des divisions du parti

Ennahdha, le propre parti de M. Jebali, refuse la décision prise la veille de dissoudre le gouvernement de la Troïka. Abdelhamid Jelassi, le porte-parole d’Ennahdha, a précisé sur les ondes de la radio shems FM avoir été surpris par la décision du chef du gouvernement. « Nous n’avons appris la nouvelle qu’au moment de sa diffusion dans les médias ! ». « Nous suivons l’évolution de la situation de près », a-t-il ajouté.

Sahbi Atig, président du bloc parlementaire d’Ennahdha au sein de l’ANC, pour sa part, a déclaré que le parti allait inciter Hammadi Jebali à revenir sur sa décision.

Mehrzia Laabidi, en tant que vice-présidente de l’ANC, a annoncé qu’une réunion de l’Assemblée aurait lieu cette après-midi, sans la présence du gouvernement ainsi qu’une autre demain, pour présenter devant l’ANC la proposition de former un gouvernement de compétences national, composé de technocrates.

La diversité des positions au sein du parti Ennahdha serait une preuve des conflits à à l’intérieur du parti.

 

Réaction des autres partis de la Troika : entre soutien et indécision

Mohamed Bennour, porte-parole d’Ettakatol, a déclaré que son parti soutenait les décisions prises par Hammadi Jebali concernant la mise en place d’un gouvernement de technocrates. Il a par ailleurs souligné que cette initiative convenait à cette étape de la transition démocratique. En revanche, le parti du Congrès Pour la République (CPR), n’a pas encore annoncé sa position.

 

Les partis d’opposition : des prises de positions éparpillées

Les partis politiques de l’opposition tunisienne, ont aussi réagi au discours de Hammadi Jebali tenu la veille et qui condamnait l’assassinat de Chokri Belaid, tout en rejetant toute implication d’Ennahdha.

Issam Chebbi, porte-parole du parti Républicain a invité Hammadi Jebali à démissionner de la tête de son parti Ennahda afin de concrétiser son initiative pour la formation d’un gouvernement de salut national, composé de personnalités indépendantes, sous entendu du parti islamiste.

Abderraouf Ayadi, le secrétaire général du mouvement Wafa a quant à lui également soutenu l’initiative de Hammadi Jebali.

Hamma el Hammemi, le leader du Front populaire, dont était membre Chokri Belaid, considère que la crise actuelle nécessite que cette décision de remaniement soit mise en place au plus vite.

Quant à Beji Caid Essebsi, le leader de Nidaa Tounes, il est allé plus loin encore et a revendiqué hier soir sur une chaîne télévisée tunisienne, la dissolution de l’Assemblée Nationale Constitutionnelle.

 

Sabra Mansar