International
15H56 - lundi 17 décembre 2012

Le 21 décembre 2012 au Guatemala : la fin du monde, mais pas pour tout le monde

 

Lors de l’assemblée générale de l’ONU du 25 septembre 2012, le Général Otto Perez Molina, à la tête du  gouvernement guatémaltèque, a invité les chefs d’états à célébrer la civilisation millénaire des Mayas et le renouveau du cycle calendaire du 13 Baktun.

Ce discours marquait-il le début d’une nouvelle ère politique prenant davantage en compte le caractère pluriethnique de la société guatémaltèque ? Au Guatemala, tout indique le contraire : début octobre, l’armée réprime dans le sang une manifestation de paysans indiens, tuant 8 personnes. De plus, la population indienne, descendante de la civilisation maya, reste quasiment absente des organes du pouvoir, à l’écart de toute prise en compte de ses revendications. Pourtant, elle représente plus de 40% des Guatémaltèques. Cynisme politique qui méprise les Mayas vivants et exalte la civilisation maya éteinte.

 

Manifestation à Guatemala city, devant le palais présidentiel. Sur le panneau : « Voici comment le gouvernement célèbre le 13 Baktun, en assassinant des paysans »
Crédit photo : Aury Cuxe

Dans le monde, le 21 décembre 2012 (correspondant au 13 Baktun) a été considéré par beaucoup comme marquant la fin de l’humanité. Le cinéma s’en est même emparé avec le blockbuster « 2012 ». Elle marque en fait le début d’un cycle de 5125 ans, selon les anciens calendriers Mayas. Cet évènement surmédiatisé a des conséquences colossales pour ce petit pays d’Amérique Centrale, qui sera submergé en décembre par un extraordinaire flot de touristes: 15 millions de personnes sont attendues sur l’ensemble du Monde Maya (Sud du Mexique, Guatemala, Belize et El Salvador).

Le secteur du tourisme repose en grande partie sur la découverte des sites archéologiques comme Tikal, sur les traditions indiennes, et sur l’artisanat qui donnent au touriste le sentiment de retrouver « l’authenticité » maya. L’affluence touristique à l’occasion du 13 baktun se base plus que jamais sur cette culture.

Cependant le gouvernement guatémaltèque, et le président Otto Perez Molina, n’ont pas su saisir cette occasion de protéger et d’exalter cette culture millénaire, ainsi que de promouvoir l’unité nationale. Les faits récents montrent à nouveau le mépris du gouvernement pour cette frange de la population, qui reste la plus pauvre et la plus marginalisée du pays. Le président fait la promotion du 13 Baktun à l’ONU ainsi qu’à l’OEA et organise quantité d’évènements (spectacles, danses, cérémonies), tandis que l’armée opère une répression meurtrière, réduisant à néant les efforts de communication du gouvernement.

L’affrontement du 4 octobre dernier, entre paysans et forces armées, s’est déroulé lors d’une manifestation dans le département de Totonicapán,  où près de 15 000 personnes dénonçaient le prix indécent de l’électricité dans les provinces. Un tronçon de la route Panaméricaine étant bloquée par une partie du cortège, l’armée est intervenue : bilan 8 morts et 34 blessés d’origine indienne.

Le président nouvellement élu, militaire de carrière, a tenté de nier la culpabilité de ses soldats. Le Guatemala a connu 36 années de guerre civile (1960-1996) marqué par un génocide (environ 250 000 victimes). Le président est lui-même soupçonné d’avoir participé aux massacres pendant la guerre. Ses discours de paix et d’union nationale à l’occasion du 13 Baktun soulèvent l’indignation des ONG qui luttent en faveur des droits indigènes.

Autre décalage entre les discours et les actes, une réforme de la loi d’extraction minière est en cours de négociation au Congrès. Celle-ci ne prévoit toujours pas de possibilité de consulter les populations concernées préalablement à l’implantation des grandes compagnies minières internationales. Pourtant le Guatemala a bien ratifié la « Convention 169 Relative aux Peuples Indigènes et Tribaux » de l’OIT en 1996, au sortir de la guerre civile, qui prévoit une consultation populaire dans ces cas précis. Ceci constitue un élément de consternation supplémentaire pour les organisations indiennes. A ce manque de reconnaissance, il faut ajouter les conflits permanents entre les communautés et les entreprises minières qui pillent littéralement le pays : seul 1% de l’or extrait doit être reversé à l’Etat.

L’absence de mécanismes de négociation et de dialogue social avec les communautés indiennes ne semble pas vouloir se combler, malgré les espoirs soulevés par le 13 Baktun, qui cristallise un certain nombre d’intérêts politiques et financiers. L’énigme majeure en ce renouveau du cycle calendaire réside dans la politique du gouvernement à l’égard des communautés mayas actuelles. Ironiquement, les cérémonies du 13 Baktun semblent profiter à l’ensemble de la région, sauf aux descendants Mayas eux-mêmes.

 

Perla Escalon

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