International
13H46 - mercredi 21 novembre 2012

Sénégal : le complexe des médias nationaux

 

Malgré la libéralisation des médias africains en Afrique, connus pour bien couvrir les informations très locales, les médias internationaux comme RFI ou la BBC ont su conserver leur influence auprès des dirigeants africains.

 

Mme Penda Mbow, professeure d'histoire à l'université de Dakar

Pour célébrer ses 50 ans de service au nom de la démocratie, la radio internationale allemande en langue française, la Deutsche Welle, a organisé une table ronde le 11 novembre dernier à Dakar sur le thème « Medias internationaux et démocratisation », animée par Mame Less Camara, journaliste sénégalais et correspondant pour la BBC, l’historienne et universitaire Penda Mbow et Abel Fosto des bureaux camerounais de la Deutsche Welle.

Il faut préciser d’emblée que le débat a davantage tourné autour du thème «Les radios internationales et la démocratisation en Afrique». La Deutsche Welle, Rfi, la voix de l’Amérique et d’autres ont en effet été témoins d’événements ayant conduit à la démocratisation de certains pays africains et ont, pendant longtemps, été les seules sources sûres d’informations.

 

Des médias internationaux en perte d’influence

 

Avant les années 1990, l’information digne de confiance était celle diffusée par des radios étrangères. Aujourd’hui, elles ont perdu du prestige mais les médias internationaux restent toujours une référence, pas pour les populations africaines mais plutôt pour ses dirigeants.

Cette perte d’influence découlerait de l’héritage colonial selon l’historienne Penda Mbow. Comme les premiers souverains étaient experts en manipulation, ce sont les stations de radio internationales qui se sont imposées comme une référence en matière d’information. Les médias internationaux ont ainsi pu formater la conscience des Africains en étant les seuls à informer l’Afrique sur ce qui se passait chez elle.

Mame Less Camara estime qu’avec l’avènement des radios privées en Afrique, la tendance a changé. « La cote des radios étrangères a reculé. Par exemple au Sénégal, si vous parlez en français, c’est 30% de la population qui vous comprend. En Wolof, c’est plus de 90 %. »


L’exclusivité des médias étrangers

 

Toutefois, les médias africains n’ont gagné que le combat de l’information locale. La preuve, pour savoir ce qui se passe au Mali, il ne faut pas compter sur les médias sénégalais et ce, malgré la proximité. Ce sont les  médias internationaux qui continuent d’informer les Sénégalais sur l’actualité  des pays voisins.

Pire, explique Moustapha Thiombiano du Burkina Faso, qui a également participé au débat. « C’est Rfi qui m’a appris qu’il y a à Ouagadougou un sommet  des exploitants miniers. Or, je suis PDG d’un groupe de presse composé de 12 radios FM et de Tvz Africa au Burkina mais aucune entité de mon groupe n’avait cette information au moment où Rfi a sorti l’info », s’indigne ce pionnier des radios privées en Afrique.

Penda Mbow ajoute que cette situation est exacerbée par « le complexe des dirigeants africains qui font plus confiance aux médias étrangers qu’aux médias locaux. Sinon comment comprendre qu’ils aillent faire leur déclaration de candidature à l’élection aux micros des journalistes étrangers ? »

L’accès à l’administration ou aux palais présidentiels est plus facile pour les journalistes étrangers que pour les nationaux. Lorsqu’un journaliste local tend son micro à un chef rebelle local, il est automatiquement interpellé par la police. D’après le journaliste sénégalais Mame Less Camara, cette situation forgerait l’arrogance de certains journalistes européens qui conservent une certaine exclusivité auprès des personnalités politiques.

Le chemin sera encore long pour équilibrer les choses et voir les médias africains vraiment libres d’informer et crédibles sur le fond.

 

Ibrahim KANDJIMOR

correspondant OI à Dakar

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