Mémoires vivantes
10H18 - lundi 27 novembre 2023

Mémoire du génocide cambodgien : quand des fragments recréent le puzzle de la mémoire. Rencontre avec Sun-Lay Tan, fondateur de Fragments #KH50

 

Samedi 2 décembre, la belle ville de Bussy-Saint-Georges en Seine-et-Marne, connue pour son Esplanade des religions et des cultures, accueillera une conférence de la mémoire autour du projet Fragments #KH50. Bussy est devenue un peu la capitale de ces générations d’Asiatiques arrivés en France tout au long du XXème siècle, notamment dans les années 70, lesquelles y ont bâti, à force de courage et de travail, un avenir pour les leurs.

Sun-Lay Tan, journaliste et militant associatif, en est à l’initiative. L’association Fragmentis Vitae Asia, dont le célèbre politologue (et humaniste engagé pour ceux qui le connaissent) Frédéric Dabi est vice-président, porte ce beau projet Fragments #KH50 en mémoire des exilés en France du génocide cambodgien. Il vise à réunir les fonds pour créer un Mémorial de la mémoire à Bussy, produire un documentaire sur l’exode et créer une plate-forme web pour recueillir les témoignages des rescapés et réfugiés.

Autant d’outils pour reconstituer ces fragments de mémoire dont les jeunes aimeraient hériter de leurs aînés, réfugiés en France lors de la guerre civile de 1970-1975 puis du génocide cambodgien des années 1975-1979.

Pourquoi des fragments ? « Un fragment est comme un morceau découvert sur un chantier archéologique, nous confie Sun-Lay Tan. Il a une histoire, notre histoire. Nous, jeunes Français dont les parents et les grands-parents sont venus du Cambodge dans les larmes et l’exil, il nous tient désormais à cœur de reconstituer ces fragments de mémoire. »

Et pourquoi #KH50 ? « Parce que le 17 avril 2025 nous commémorerons le cinquantenaire du déclenchement du génocide cambodgien perpétré par les Khmers Rouges et qui a causé des millions de morts et un exode massif ».

Les Cambodgiens semblent beaucoup plus discrets que les Arméniens, les juifs ou les Rwandais pour parler du génocide qu’ils ont subi. A cette impression singulière, Sun-Lay Tan répond : « On en parle plus en famille que publiquement. Si en France c’est beaucoup l’Etat et les corps constitués qui se chargent de la transmission de la mémoire et que dans le monde anglo-saxon, les témoignages individuels sont le moteur de la transmission, en Asie, la mémoire se partage en famille. D’ailleurs, dans de nombreuses familles, on l’évoque plus qu’on en parle. Peut-être que pour nos parents qui nous ont souvent transmis une éducation sévère et traditionnelle, parler de ses blessures, de ses souffrances peut être perçu comme un aveu de faiblesse ».

Le 2 décembre, le projet de mémorial sera dévoilé par quatre artistes, des témoignages de survivants et de descendants du génocide et deux films du réalisateur Denis Do viendront reconstituer ces fragments d’une mémoire bien vivante.

 

Michel Taube

 

Programme et inscription : https://www.fragmentis-vitae.org/

Directeur de la publication