Edito
07H12 - vendredi 2 septembre 2022

Pour un grand ministère de la prévention et de la protection civiles. L’édito de Michel Taube

 

Source : http://www.prevention-incendie-foret.com/

Gigantesque incendie dans la baie d’Arcachon, manque d’eau potable dans des communes de Corse et des Vosges, même mise à l’arrêt dans le Rhône de réacteurs de centrales nucléaires pour respecter les limites réglementaires sur la température des cours d’eau, récoltes agricoles durablement affectées, nous avons vécu l’été de tous les dangers mais aussi, espérons-le, l’été de la prise de conscience collective.

On le sait déjà, l’année 2022 restera marquée par une forte accélération du réchauffement climatique et de ses conséquences : multiplication des incendies (même dans le nord de la France), grande sécheresse sur l’ensemble du territoire métropolitain. Craignons aussi que des pluies torrentielles se multiplieront dans les mois qui viennent.

Les effets du dérèglement climatique commencent à peine à sévir. Chaque année les Français redécouvrent sur les lieux des incendies cette petite armée que constitue la protection civile, composée de plusieurs centaines de milliers de femmes et d’hommes, professionnels ou bénévoles, sapeurs-pompiers, surveillants de plages et de lieux de villégiature, pilotes, secouristes, soignants, logisticiens, météorologues. Ces premiers de cordée doivent ici être remerciés.

Mais si éteindre les incendies, c’est valeureux, les prévenir, c’est encore mieux ! Trois chiffres devraient nous en convaincre : plus de 85% des incendies sont d’origine humaine. Que fait-on pour dissuader les humains d’allumer ces feux, par mégarde, imprudence ou mauvaise intention ? En France, le gaspillage passif d’eau potable par les particuliers et les organismes privés et publics représente 10 à 20% de la consommation totale de ce bien si précieux et vital. On estime enfin que seuls 15% des Français connaissent les gestes qui sauvent. C’est bien plus en Allemagne ou en Espagne.

Ces événements de l’été 2022 imposent une prise de conscience immédiate de l’urgence à déployer une grande politique nationale de gestion des catastrophes climatiques et de renforcement de la protection civile pour une France plus résiliente face aux crises.

Cette priorité nationale, seul un grand ministère de la protection civile rattaché à la Première ministre permettrait de la porter pour relever les multiples défis du réchauffement et du dérèglement climatiques. Des personnalités comme Olivier Richefou, Président de la Conférence Nationale des Services d’Incendie et de Secours (CNSIS), également président du département de la Mayenne, l’ont proposé tout au long de l’été. Qu’attend Emmanuel Macron pour passer à l’action ?

Ce grand ministère permettrait simultanément de revaloriser les métiers de la protection civile, de renforcer les moyens, de mieux coordonner les ministères, services de l’Etat, collectivités locales et unités de protection civile, et, enfin, de transformer les Français en acteurs de la prévention civile. Ce dernier axe est décisif : de grandes campagnes de communication, de formation et de prévention, dans les écoles, mais aussi sur les lieux de travail, sur les réseaux sociaux dans les médias permettraient de faire connaître à tous les Français les gestes qui sauvent et les comportements à risques.

Ce même ministère redonnerait ses lettres de noblesse à l’ONF, l’Office National des Forêts, qui a été littéralement dépecé ces dernières décennies par les pouvoirs successifs. Un tiers de la superficie de la France est recouverte de forêts, un véritable patrimoine national. Mais l’outil de gestion des forêts, qui garantissait notamment la présence de gardes-champêtres, nous manque cruellement aujourd’hui.

Enfin, et ce n’est pas la moindre des priorités, il faut sérieusement se poser deux questions embarrassantes :

  • Les pyromanes sont souvent des pompiers (dans l’Hérault fin juillet, un d’entre eux a été arrêté pour huit départs de feu), illustration parmi d’autres faits de la grande dépression qui frappe les Français. Les pouvoirs publics devraient investir dans l’accompagnement psychologique, la détection des profils fragiles parmi les professionnels et les volontaires du feu.
  • Il faut enfin se demander s’il n’y a pas parfois un lien entre la multiplication des incendies et les agressions multiples dont les pompiers sont souvent victimes dans certains quartiers. Ne seraient-ce pas parfois les mêmes délinquants criminels, ces sauvageons, qui, à moto (après un rodéo urbain ?) ou autrement, mettent le feu à une forêt pour lâchement exprimer leur haine de la France ? Ce n’est qu’une hypothèse évidemment mais lorsque 40 départs de feu presque simultanés sont constatés non loin de périphéries urbaines, cela interroge.

L’heure n’est plus à la planification de la TRANSITION, pour reprendre l’intitulé des ministères en charge de l’écologie et de l’énergie dans le gouvernement d’Elisabeth Borne, mais à L’URGENCE, à la mobilisation générale et à la prévention !

 

Michel Taube

 

Directeur de la publication