Edito
15H06 - lundi 28 mars 2022

« Macron assassin » ? De l’art — et du sens — du second degré. L’édito de Michel Taube

 

Au grand dam d’Éric Zemmour et de ses partisans, on ne retiendra qu’une seule chose de son grand meeting au Trocadéro : les cris de « Macron assassin » scandés par une partie de la foule, lorsqu’il égrena les noms de victimes du terrorisme islamique.

Après le meeting, le candidat nationaliste affirma d’abord ne pas avoir entendu ces slogans, avant de les condamner et de dénoncer ce matin la récupération politicienne et médiatique qui lui est tombée dessus. Quant à la réaction d’Emmanuel Macron raillant Zemmour comme un malentendant, cela ne rehausse pas le débat.

Éric Zemmour s’attendait-il à des dérapages au Trocadéro où il a fait le plein de militants et adressé un message très fort aux Français de confession musulmane ? Il avait annoncé la veille que « Toute la France est invitée, sauf les provocateurs d’extrême droite, d’extrême gauche et d’extrême bêtise ».

Ces cris sont effectivement condamnables, et Éric Zemmour aurait gagné en présidentialité s’il avait immédiatement demandé qu’ils cessent, personne ne pouvant croire qu’il ne les a pas entendus.

On lui avait déjà reproché d’avoir lui-même proféré la même accusation à l’encontre de François Hollande et Angela Merkel, devant le Bataclan où périrent 130 personnes, le 13 novembre 2015.

Éric Zemmour sait qu’il ne sera pas président de la République, et que sauf attentat islamiste de dernière heure, il a peu de chance d’être au second tour. À moins qu’un vote caché ne vienne renverser la table ! Le Covid et surtout la guerre d’Ukraine et ses implications économiques sont passés par là. Indépendamment de la conjoncture, le candidat n’a su lever les inquiétudes quant à ses capacités à présider la France ni les risques de guerre civile que son élection pourrait déclencher. En 2027, il n’y aura plus de sortant si Emmanuel Macron est réélu le mois prochain. S’il persiste à nier ou minimiser l’importance qu’a pour les Français la crise identitaire, sécuritaire et migratoire, c’est au premier tour qu’un candidat nationaliste, peut-être Marine Le Pen (qui peut fort bien rempiler une quatrième fois), Éric Zemmour ou Marion Maréchal pourrait être élu dans cinq ans.

Pour l’heure, Éric Zemmour n’a plus que son clan à rassembler. Il était donc inutile de condamner les excès de ses partisans les plus fervents. Autant les assumer. Au premier degré, accuser Emmanuel Macron d’être un assassin est aussi absurde que calomnieux. Mais n’est-il pas tout autant absurde de prendre ces accusations au premier degré comme l’ont fait tant de médias ? Il est certain que la formule n’est pas très élégante. Elle est injurieuse et outrancière. Mais passées l’émotion et l’indignation, on ne saurait nier que la faiblesse de la réponse politique à l’islamisme radical, comme à l’immigration incontrôlée, est bien responsable de l’entrée ou du maintien sur le territoire d’individus devenus assassins.

Certes, l’inverse peut également être vrai : n’avait-on pas entendu en 2015 que la participation de la France à la guerre contre DAESH et la fermeté du Premier ministre Manuel Valls à l’égard de l’islamisme et de l’antisémitisme avaient déchaîné les haines et encouragé le terrorisme. Suivre cette logique conduirait à se coucher devant ces idéologies mortifères et liberticides, reproche largement fait à Emmanuel Macron, dont les actes en la matière n’ont guère été à la hauteur des discours.

Emmanuel Macron n’est évidemment pas un assassin. Est-il même utile de la préciser ? Mais le président sortant a sa part de responsabilité dans l’expansion de la pensée et des agissements islamistes en France. Exemple parmi d’autres, mais si lourd de conséquences : l’assassinat d’Yvan Colonna en prison par son codétenu Franck Elong Abé. Ce Camerounais condamné pour « association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un acte de terrorisme » fut arrêté en Afghanistan, où il faisait le djihad aux côtés des Talibans. Incarcéré en France, son comportement en prison confirma son fanatisme, sa violence et sa dangerosité. Ce n’est ni Emmanuel Macron, ni l’administration pénitentiaire qui a assassiné Yvan Colonna, lui-même condamné pour l’assassinat du Préfet Claude Erignac. Mais Franck Elong Abé n’avait rien à faire en France, et s’il devait y purger une peine avant une expulsion qui ne serait jamais intervenue, c’eut été à l’isolement, dans un quartier de haute sécurité. Expulsion ? Pardon, cet assassin avait été naturalisé Français. La déchéance de nationalité, proposée par François Hollande, au lendemain du Bataclan, aurait permis d’éviter ce drame.

Chef de l’État tout puissant sous la Vème République, Emmanuel Macron n’est pas coupable, mais bien le premier responsable du manque de fermeté de l’État face à l’islamisme. Aujourd’hui, il veut faire de l’éducation l’axe fort de sa campagne, alors qu’un des faits les plus marquants de son premier mandat fut la décapitation d’un enseignant, Samuel Paty, par un islamiste. Il se vante d’avoir fait fermer quelques mosquées salafistes alors que les Frères musulmans, experts en infiltration (la fameuse taqiya) sont déjà présents au cœur de nombreuses institutions publiques et privées, et qu’il demeure des centaines de lieux de culte qui sont autant de lieux d’embrigadement et d’endoctrinement. Emmanuel Macron a-t-il pris la mesure de la gravité du problème ? Tout conduit à en douter à la lecture de son programme fourre-tout.

Pas de vague, pas d’amalgame. On connaît la chanson !

Michel Taube

Directeur de la publication