Edito
12H10 - mardi 22 février 2022

Parrainages : Macron ne sauvera pas l’Ukraine, mais peut nous éviter une Bérézina démocratique. L’édito de Michel Taube

 

Emmanuel Macron avait sans doute raison de s’occuper de la paix en Europe, même si la France n’a pas grand poids dans la résolution de la crise ukrainienne. D’ailleurs, en reconnaissant l’indépendance des républiques autoproclamées de Donetsk et de Louhansk, Vladimir Poutine a confirmé qu’il n’écoutait que lui-même.

Mais notre cher président serait bien inspiré de s’occuper aussi de la bonne santé de la démocratie française, déjà très affaiblie par la tournure prise par la Vème République depuis que le septennat a été remplacé par le quinquennat, avec des députés plus godillots que jamais.

Alors qu’approche la date limite de réception des parrainages des candidats par le Conseil constitutionnel (le 4 mars), trois des quatre principaux opposants à Emmanuel Macron, qui ensemble ne sont pas loin de représenter la moitié de l’électorat (et qui au deuxième tour pourraient même dépasser ce cap) n’auraient pas obtenu les 500 parrainages d’élus, nécessaires pour se présenter au suffrage des Français.

Certes, on peut imaginer une dramatisation orchestrée par Marine Le Pen, Éric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon, mais cela ne tient pas de la certitude : ce ne sont pas les candidats qui transmettent leurs parrainages au Conseil constitutionnel, mais les élus eux-mêmes. De nombreux politiques de tous bords, à l’exception de la gauche qui, hors Mélenchon, a beaucoup de parrainages et très peu d’intentions de vote, crient au scandale démocratique.

Saluons les initiatives de David Lisnard, maire de Cannes et président de l’Association des Maires de France, et de François Bayrou qui, chacun à sa manière, contribuent à éviter un déni démocratique.

La gauche, mais aussi la macronie, s’accommoderaient-ils de ce scandale ? Le Président de la République, chef de l’État, est garant du bon fonctionnement de la démocratie. Si un seul de ces trois candidats ne pouvait se présenter, ce serait en effet un scandale. Certes, il est vraisemblablement trop tard pour changer la règle du jeu, mais Emmanuel Macron devrait, tout comme les autres leaders politiques, surtout ceux qui ont déjà leurs 500 parrainages, appeler solennellement les élus à sauver notre démocratie.

Car nous en sommes bien là. Sans Le Pen, Zemmour et Mélenchon, le résultat de la présidentielle serait légitimement contesté dans la rue. A minima, appeler à voter contre Emmanuel Macron, quel que soit son adversaire au second tour, serait en revanche parfaitement légitime.

Les candidats, à commencer par le sortant, devraient aussi s’engager à réformer cette règle inique d’accès à l’élection. La moindre des mesures serait de rétablir l’anonymat des parrainages, mais il existe des alternatives, comme l’investiture populaire, souvent évoquée.

Emmanuel Macron ne pourra sauver l’Ukraine et encore moins le monde. Mais il peut sauver la France d’une impasse dont les conséquences seraient dévastatrices.

 

Michel Taube

Directeur de la publication