Edito
07H10 - lundi 6 décembre 2021

Éric Zemmour est-il revenu dans la course à l’Elysée ? L’édito de Michel Taube

 

 

Michel Taube commentait hier matin un week-politique décisif sur CNEWS avec Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de la Revue politique et parlementaire. Replay.

Un slogan très gaulois, « impossible n’est pas Français », un petit laurier en forme de signature symbolique, une agression physique qui ne l’a pas empêché de monter sur scène, un parti enfin lancé sous le nom « Reconquête ! », une liesse débordante de 12000 afficionados, le professionnalisme de l’organisation d’un meeting improvisé vu les circonstances par une équipe néophyte (ou presque)… Éric Zemmour a plutôt réussi son pari. Malgré les échauffourées provoquées par des militants de SOS Racisme, il a correctement rempli l’immense hall de Villepinte. Il a été efficace sur la forme et crédible sur le fond, reprenant largement les propositions entendues lors des débats de la primaire de LR, y compris celles de Valérie Pécresse, notamment sur le plan économique et fiscal. Nous en sommes pour le moment à des généralités ou à des grandes lignes, mais elles ne laissent pas supposer d’aventurisme démesuré.

Le polémiste devenu animal politique a tenté de décrédibiliser les accusations de racisme, de fascisme ou de misogynie. Il a violemment attaqué Emmanuel Macron, non sans un certain sens de la formule.

Deux points capitaux se sont joués à Villepinte : tout d’abord, Éric Zemmour a fait applaudir son « ami » Éric Ciotti, auquel il a ostensiblement tendu la main. C’est que, plus que jamais, le député des Alpes-Maritimes, dont Valérie Pécresse avait annoncé le matin même qu’elle ne retiendrait pas le programme de son concurrent battu, détient les clés du premier tour de la présidentielle : sera-t-il loyal avec Pécresse, celle-ci en fera-t-elle son bras de campagne ou Ciotti finira-t-il par céder aux sirènes zemmouriennes, ce qui pourrait faire basculer le sort du premier tour de l’élection présidentielle.

Second point capital : Éric Zemmour a tendu la main aux Français de confession musulmane qui acceptent les valeurs de la République et l’assimilation. Ce point clé sera certainement décliné à l’envi dans les semaines qui viennent pour faire mentir les accusations de stigmatisation. Et puis on ne rechigne pas à s’adresser à près de 10% (peut-être plus, peut-être moins) du corps électoral.

Très RPR, Eric Zemmour a fait référence à Jacques Chirac, Valéry Giscard, Alain Juppé et François Bayrou, considérant qu’ils ont tous tenu à l’égard de l’immigration un discours voisin du sien, avant, selon lui, de trahir leurs électeurs.

Oubliés ses dérapages, ses gestes déplacés, son révisionnisme ? Éric Zemmour se veut désormais un candidat “normal”, peut-être trop pour certains de ses fervents adeptes de la première heure… et du grand soir. Mais ceux-ci ne lui suffiront pas pour entrer à l’Élysée, raison pour laquelle son grand challenge sera de rassembler les droites, d’abord pour devancer Marine Le Pen et Valérie Pécresse au premier tour, puis pour battre Emmanuel Macron au second. La candidate LR étant susceptible de prendre des voies au président sortant, la bataille sera rude pour atteindre le second tour. Quatre prétendants peuvent se retrouver dans un mouchoir de poche, et il est aujourd’hui improbable que l’un des deux candidats nationalistes se retire. Le suspense sera insoutenable jusqu’au dimanche 10 avril 2020 à 20h.

Éric Zemmour, comme Marine Le Pen, refuse qu’on les affuble de l’étiquette d’extrême droite. Ils sont pourtant à cette place sur l’échiquier politique actuel, même si on peut débattre de leur appartenance à ce que représente historiquement ce courant. Cela vaut d’ailleurs aussi pour La France Insoumise et l’extrême gauche.

Éric Zemmour (et Marine Le Pen) est nationaliste. Or l’histoire, cette fameuse histoire à laquelle il n’a cessé de se référer, nous enseigne que le nationalisme a toujours été, tout particulièrement, en situation de crise, l’antichambre de la haine, du rejet de l’autre, du racisme, parfois du fascisme, de la guerre civile, voire de la guerre tout court. Si l’on peut dénoncer la provocation des militants de SOS racisme, on peut aussi noter la violence des supporters d’Éric Zemmour à l’encontre desdits militants.

Et la rengaine d’Eric Zemmour, qui dénonçait hier la « haine des médias » et de ses supporters contre les élites médiatiques (les journalistes de Quotidien sur TMC ont été bousculés et vilipendés) ne va pas arranger le traitement à charge des journalistes.

Éric Zemmour pourrait-il incarner une nouvelle forme de nationalisme positif et joyeux ? On peut s’inquiéter de la manière dont ses électeurs appliqueraient la préférence nationale ou ethnique en cas de victoire en avril prochain, et de l’atmosphère qui règnerait dans une France dirigée par des nationalistes populistes, qu’il s’agisse de Zemmour ou de Le Pen.

Tout président doit s’appuyer sur une équipe compétente. C’est là que le bât blesse pour Éric Zemmour, même s’il espère que cela changera dans un proche avenir. Il rêve d’un ralliement d’Éric Ciotti, qui changerait significativement la donne. Le relatif manque de poids lourds dans les gouvernements Macron a d’ailleurs également marqué ce quinquennat finissant. À l’inverse, les débats de la primaire des Républicains ont globalement donné un sentiment de compétence, même si, comme l’a souligné Éric Zemmour, ils ont tous glissé sur ses terrains de prédilection. C’est encore Zemmour qui fixe le tempo !

Éric Zemmour a réussi ce à quoi beaucoup ne croyaient plus : revenir dans la course et endosser le costume du candidat à la présidence. Gagner cette course sera une tout autre affaire, et ce n’est pas un beau discours qui fera un bon président. Sans quoi nous n’aurions eu que de forts bon présidents !

Mais la course est lancée et le sprint commence !

 

Michel Taube

 

Directeur de la publication

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