Edito
06H55 - samedi 27 novembre 2021

Du nationalisme… et de Zemmour. L’édito de Michel Taube

 

L’analyse de Michel Taube sur CNEWS dans le Débat avec Guillaume Bigot, éditorialiste, samedi 20 novembre 2021 : pourquoi Zemmour peut aller loin ou est-ce le début de sa chute ?

Pourquoi Zemmour est-il le trublion de la présidentielle ? Parce qu’il réveille à lui tout seul la querelle nationalisme – patriotisme qui rythme l’histoire des grandes nations. Comme l’a fait Trump aux États-Unis, Boris Johnson et les partisans du Brexit au Royaume-Uni ou un Viktor Orban en Hongrie.

Pourquoi Zemmour pourrait-il échouer ? Parce que ses outrances révisionnistes et ultra-nationalistes sont en train de le couper de la classe moyenne de droite.

Certes, la France est chrétienne et plus précisément catholique depuis le haut Moyen-âge. La France ne va pas cesser d’être subitement, parce que certains veulent effacer puis réécrire son histoire ni parce que la majorité des Français se dirait athée.

Et pourtant, les Français commencent sérieusement à trembler, car ils voient arriver un autre « grand remplacement » venu d’Amérique du Nord, et parfois appelé wokisme, qui déferle sur la France. La statue de Saint-Michel, aux Sables-d’Olonne : on déboulonne, prétendument au nom de la laïcité, mais dans une acception extrémiste qui transforme n’importe quelle idéologie en débilité. Les statues de Colbert : on déboulonne. Le sapin de Noël, on interdit. Mais on défend le voile islamique, étendard de la liberté alors qu’il est un outil de conquête de la confrérie des Frères musulmans, et non un fantasme d’extrême droite.

Éric Zemmour, par ses excès, a décrédibilisé les vérités qui lui avaient valu son envolée initiale. Mais la réalité a beau déranger, elle demeure la réalité. Trop d’enquêtes conduisent à la même conclusion. La structure de la population française évolue si rapidement que les Woke finiront par avoir raison : la France, dans sa dimension historique et identitaire, aura vécu d’ici quelques générations sans changement drastique de la politique d’immigration, l’intégration — assimilation des arrivants, et avec une tolérance zéro pour ceux qui la refusent. Elle ne deviendra pas pour autant une théocratie islamique, pas tout de suite en tout cas. Mais que deviendra-t-elle ? Un archipel fait de communautés qui au mieux s’ignoreront, au pire se combattront ?

Un pays, surtout avec une histoire aussi ancienne et riche que la France, est aussi une nation. Il ne faut pas en avoir honte, parce que cette idée est ternie par l’idéologie nationaliste, ou parce que la gauche bienpensante et moralisatrice, trop souvent imitée par la macronie, traite de fasciste celui qui aime son pays et veut défendre sa nation. Le pays, la nation, le territoire et donc la frontière sont inscrits profondément dans l’histoire de l’humanité. Dans ses gènes, sans doute. Quand l’équipe de France de rugby passe 40 points aux All Black, comme elle l’a fait le 20 novembre dernier, devant un stade en fusion, personne ne s’offusque de ce patriotisme, cette joie qui a bien une dimension nationale.

Zemmour, c’est un peu la nation assumée et une fierté française matinée (pardon, patinée) d’orgueil et de condescendance pour les autres (reproche souvent fait aux Français).

Mais le nationalisme politique, celui incarné en France par Marine Le Pen ou Éric Zemmour, c’est bien autre chose que l’amour du pays ou de son équipe de rugby. Du moins, ce n’est pas que cela. C’est une idéologie qui partout où elle a exercé le pouvoir, a immanquablement conduit au racisme ou à la guerre, au désastre sous une forme ou une autre.

Car le nationalisme met la nation au-dessus des valeurs pour lesquelles de grandes nations, précisément, se sont battues. Les nationalistes sont des populistes, au sens le plus péjoratif du terme. Si le peuple veut rétablir la peine de mort ou expulser les étrangers, il faut lui donner satisfaction. Ce n’est que lorsque le peuple veut se débarrasser des nationalistes qu’ils ne l’écoutent plus. Le nationalisme conduit aussi à la dictature.

La convention européenne des droits de l’Homme et la cour éponyme sont bien plus souples que les populistes nationalistes l’affirment en matière de libertés et d’ordre public. La Cour a su, en Turquie avant Erdogan, et en France dans plusieurs décisions courageuses, valider l’interdiction du voile islamique au nom du vivre-ensemble propre à chaque pays.

Ces instances permettent aux États de se protéger, dans le respect des principes fondamentaux dont nous devons être fiers, et qui sont partagés par la plupart des pays démocratiques. Ces principes doivent être supérieurs à la volonté populaire, car ils sont le fruit d’une longue maturation et constituent autant de progrès pour l’humanité : démocratie, égalité entre femmes et hommes, liberté de la presse, indépendance (mais pas irresponsabilité) de la justice, prohibition du racisme…

Tout ramener à la nation est donc absurde, surtout dans un monde globalisé où personnes, marchandises, capitaux et virus circulent abondamment. De même, croire ou faire croire que la France, avec moins de 1 % de la population mondiale, peut résister aux États-Unis et leurs GAFAM ou à la Chine et ses BATX est une imposture.

Alors oui, on peut, on doit aimer son pays et la nation qu’il abrite. Quand donc les jeunes Français salueront le drapeau français (et européen) le matin dans la cour d’école ?

Cet amour est d’autant plus justifié qu’au fil de ses quinze siècles d’histoire, la France a créé, inventé, imaginé tant de merveilles technologiques, culturelles, politiques, philosophiques… Elle est un joyau parmi les nations, malgré ses pages noires qu’il ne faut pas chercher à dissimuler ou à minimiser, tout en les contextualisant.

La France d’aujourd’hui est encore le pays des lumières, lumières que la coalition des obscurantistes, nationalistes sectaires et voutés, alliés objectifs des islamistes et islamogauchistes, wokes, indigénistes et autres pseudo-écologistes, s’acharnent à éteindre.

Zemmour, Le Pen, Mélenchon, même combat ?

Vive la France, mais halte au nationalisme et au wokisme !

Michel Taube

Directeur de la publication

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