Edito
08H10 - mardi 27 avril 2021

Covid : le super variant indien va-t-il changer la donne ? L’édito de Michel Taube

 

Les variants sont-ils un péril qui pourrait ruiner tout espoir de retour à une vie normale, voire remettre sous cloche des pays qui l’ont retrouvée ou sont en voie d’y parvenir ?

Manifestement Jean Castex en doute fort : on se demande pourquoi hier dimanche il s’est rendu à Roissy pour dire qu’il pensait que les variants brésilien et indien étaient en reflux.

En Inde, la flambée de l’épidémie de Covid sème la panique dans la plus grande démocratie du monde. C’est d’Inde que vient aujourd’hui le péril principal : le variant B 1.617 serait encore plus contagieux et résistant aux vaccins que ses camarades brésilien et sud-africain. Identifié en Europe, notamment au Royaume-Uni, il est probable qu’il soit déjà présent en France, ou du moins que cela ne saurait tarder. Quand bien même ne provoquerait-il pas d’infection plus virulente que les autres souches, ces deux caractéristiques suffisent à en augmenter considérablement la dangerosité, au point de compromettre toute la stratégie vaccinale. Devant un tel péril, dont les conséquences dépasseraient largement la sphère sanitaire, il serait irresponsable de tergiverser au nom de règles juridiques ou d’un raisonnement idéologique qui valent en temps de « paix », mais pas de « guerre », dans laquelle nous serions engagés, dixit notre cher Président de la République, sans jamais nous être donné les entiers moyens de la gagner.

Gabriel Attal a annoncé un isolement obligatoire de 10 jours pour les voyageurs venant d’Inde. Mais si cette mesure n’est pas très rapidement adoptée au niveau de l’Union européenne, la France devra en tirer les conséquences en appliquant cette quarantaine non seulement aux voyageurs, même français, venant de pays situés hors de l’Union, mais aussi à ses frontières intérieures. En d’autres termes, personne ne doit pouvoir entrer en Europe, ou à défaut en France, sans passer par la case quarantaine. Cela peut s’organiser si on le veut, ne serait-ce qu’en réquisitionnant les hôtels aux frais de la princesse qu’est notre bel Etat providence, hôtels tous vidés de leurs touristes. C’est contraignant, nuisible à l’activité économique, mais bien moins qu’un confinement généralisé, une fermeture totale de frontières ou une vague épidémique massive qui se jouerait de la vaccination, avec potentiellement des dizaines de milliers de morts à la clé, ainsi qu’une nouvelle récession économique qui sonnerait le glas du « en même temps » macronien. Soyons clair : il s’agirait là d’un scénario catastrophe qu’il est plus prudent d’éviter que d’en nier le risque. Gouverner, c’est prévoir et choisir. En guerre, tergiverser, c’est périr.

 

Alors, y a-t-il danger avec le variant indien ?

Le variant anglais est actuellement majoritaire en France et ne serait pas plus létal que la souche initiale, même si les études qui se succèdent n’aboutissent pas toutes aux mêmes conclusions. En revanche, il est plus contagieux dans des proportions qui ne font certes pas l’unanimité dans la communauté scientifique, mais qui sont suffisantes à entraîner mécaniquement une augmentation de la mortalité. Les 127.000 morts du Royaume-Uni ne sont pas seulement le résultat de la réouverture prématurée des bars. En dépit des gestes barrières et tout particulièrement du port du masque, ce variant s’est massivement répandu, y compris en France où bars, restaurants et activités « non essentielles » sont à l’arrêt.

A quelques rares exceptions près, tous les scientifiques de la planète expriment leur inquiétude devant d’autres variants, de plus en plus nombreux, dont le degré de dangerosité n’est et ne sera pas identique, dans un sens ou dans l’autre, à celui de la souche initiale, comme c’est le cas pour toute mutation de virus.

Les variants du Brésil, d’Afrique du Sud et donc d’Inde inquiètent. Pour ne pas affoler la population française qui regarde avec envie les Anglais, les Américains et les Israéliens entrer de plain-pied dans l’après-Covid, les pouvoirs publics et certains scientifiques tendant à minimiser voire à nier le péril des variants, en se fondant sur l’absence d’études démontrant leur dangerosité. On entend dire que les services de réanimation brésiliens trieraient les malades au bénéfice des plus jeunes, pour en déduire que ceux-ci ne seraient pas plus touchés par le variant que par la souche initiale. On entend aussi que l’explosion de la mortalité en Inde serait due au relâchement de la population, et non au variant…

S’il ne faut pas tirer de conclusions hâtives et alarmistes, plusieurs indices tendant à justifier les inquiétudes de la majorité des médecins, et conduisent à demander à notre gouvernement de tout mettre en œuvre pour éviter que ces variants deviennent majoritaires en France, s’il n’est pas déjà trop tard. Dans un EHPAD de la Creuse, ils ont provoqué une recrudescence des contaminations, même parmi des patients et soignants vaccinés. Si le grand âge des patients décédés ne permet pas de déduire une plus grande létalité de ces variants, la flambée épidémique que connaît la Creuse ne laisse guerre de doute sur leur plus forte contagiosité : les chiffres de l’ARS Nouvelle-Aquitaine démontrent que le taux d’incidence y a bondi de plus de 140 % en une seule semaine, avec environ un tiers de variants brésiliens et sud-africains. Le Conseil scientifique craint que le variant brésilien BR-P1 devienne majoritaire dès cet été, alors que les mesures de restriction commenceront à être progressivement levées à partir de mai. Dans plusieurs pays ont été observés des cas de réinfections après une contamination par la souche initiale et une moindre protection par les vaccins.

Mais qui croire ? Selon notre Haute autorité de santé, le vaccin Pfizer/BioNTech serait très efficace contre le variant sud-africain, ce que contestent l’Institut Pasteur (publication dans la revue Nature Medicine)  et une étude américaine, tout comme le laboratoire lui-même. S’agissant du variant brésilien, une unanimité semble se dessiner en faveur d’une moindre efficacité du vaccin. Notons qu’une étude israélienne conclut même une moindre efficacité face au variant anglais, alors que la HAS pense le contraire. Quant au vaccin AstraZeneca, une étude sud-africaine conclut à sa moindre efficacité face au variant…brésilien ! Le nouveau venu Janssen/Johnson & Johnson semble au contraire bien fonctionner contre les variants anglais, sud-africain et brésilien, ce que confirme l’OMS.

Pfizer/BioNTech a déjà laissé entendre qu’il faudra se faire revacciner régulièrement… et que le prix de son précieux sérum va bondir. Au final, avec le covid, ce sera comme avec la grippe : un nouveau vaccin chaque année !

 

Michel Taube

 

 

 

 

 

 

 

 

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Directeur de la publication

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