Edito
07H35 - jeudi 12 décembre 2019

Berger lâche Macron : Réformisme 0 – populisme 1. L’édito de Michel Taube

 

Sur BFMTV, Céline Pitelet recevait jeudi 12 décembre à 21h30 Michel Taube avec Jacky Isabello, co-fondateur de CorioLink, Leo Klimm, correspondant à Paris du Süddeutsche Zeitung, avec Matthias Tesson de BFMTV pour commenter une journée de crise sociale.

Comme le disait mardi le sénateur de l’Allier, Claude Malhuret, en interrogeant le premier ministre lors de la séance des questions au gouvernement au Sénat, « la France est aujourd’hui divisée en deux camps : ceux qui râlent et ceux qui râlent contre ceux qui râlent. Ces derniers jours, on a surtout entendu les premiers. » Cela risque de durer ! Et Laurent Berger et la CFDT y sont pour quelque chose…

Le patron du premier syndicat de France est déçu par les annonces d’Édouard Philippe. La CFDT était pourtant pour la réforme « systémique » et l’instauration d’un système universel par point. Mais elle avait fixé une ligne rouge : pas d’augmentation de la durée de la vie active… La fameuse réforme « paramétrique ».

Alors que partout dans le monde développé, l’âge de départ en retraite se rapproche inexorablement de 70 ans, Laurent Berger considère qu’une retraite à taux plein à 64 ans est un casus belli. Certes, la création de cet âge d’équilibre à 64 ans revient à annihiler le concept de l’âge légal à 62 ans.

Mais comment ne pas être circonspect face au choix de Laurent Berger d’appeler à rejoindre la journée de mobilisation du 17 décembre ?

Personne ne pouvait s’attendre à ce qu’il se déclare totalement satisfait, mais de là à s’arc-bouter sur cet âge pivot ou d’équilibre de 64 ans, en méconnaissance de l’allongement de la durée de vie et du recul constant de la pénibilité, et reprocher au gouvernement de trop tenir compte des contraintes budgétaires, fait basculer la CFDT dans cet archaïsme syndical qui plombe la France parmi d’autres maux.

Laurent Berger cède-t-il à la pression de la CFDT cheminots qui a déjà rejoint il y a quinze jours le mouvement de grèves lancé par la CGT et consorts le 5 décembre ? Les querelles internes à la CFDT prennent-elles le pas sur l’intérêt général ? Le syndicat réformiste risque d’y perdre sur tous les fronts : Laurent Berger donne l’impression de courir après la CGT et Philippe Martinez, lesquels ne voient comme unique remède à tous les problèmes que la tonte des riches et des entreprises.

Attention, on préfère toujours l’original à la copie et la CGT a remporté hier une victoire politique et idélogique sur la CFDT.

La France va mal et le blocage du pays risque de se traduire par un effondrement de la compétitivité de ses entreprises, des faillites en masses parmi les PME et TPE, notamment dans les centres villes de la région parisienne, et une nouvelle hausse du chômage.

Mais finalement, Laurent Berger a raison ! Mieux vaut renoncer à réformer, attendre que le régime des retraites s’effondre de lui-même, que les caisses soient vides, que la révolte devienne révolution, et que les gauchos-fachos prennent le pouvoir. Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon se frottent les mains. Et pourtant, ils n’ont à proposer que l’autoritarisme, l’effondrement économique et la ruine.

C’est d’avoir pris la mesure des efforts désastreux de sa réaction épidermique de mercredi à la sortie du Conseil économique, social et environnemental qui a conduit Laurent Berger à rétropédaler toute la journée d’hier ? Le patron de la CFDT s’est efforcé de contenir les termes de sa colère, de s’écarter de la position jusqu’auboutiste de la CGT. Ils défileront donc séparément mardi 17. On verra dans les jours qui viennent si le mal et fait et l’effet de ces valse hésitations. Il est urgent qu’Edouard Philippe et Laurent Berger se parlent et trouvent un compromis.

 

Michel Taube