Edito
09H38 - jeudi 4 avril 2019

Incroyable mais vrai : les députés britanniques s’entretuent sur un projet d’accord qu’ils n’ont pas lu ! L’édito de Michel Taube

 

La démocratie, ce sont les formes, la transparence et l’information…

Rappelons-nous 2005 et le projet de traité constitutionnel européen rejeté par référendum par les Français et validé ensuite par le Parlement. Le traité comportait plus de cent pages avec de multiples annexes : sa complexité avait joué un rôle clé dans le vote négatif des Français. Sa technicité avait édulcoré pour ne pas dire ruiné la dimension « Constitution » que ses partisans voulaient lui donner. A l’époque, Valéry Giscard d’Estaing, pourtant fin politique, avait, selon nous, endossé une responsabilité politique majeure dans ce naufrage car il n’avait su (ou même pensé), comme président de la Convention ayant rédigé le Traité, donner au texte une forme politique et non technicienne. Ce n’était pas une Constitution que l’on proposait aux citoyens européens.

Même cause, mêmes effets… Revenons à 2019 : le projet d’accord entre l’Union Européenne et la Grande-Bretagne fait 580 pages et de nombreuses annexes. Les équipes de Michel Barnier et de Theresa May n’ont pas rédigé un executive summary, pardon, un résumé synthétique officiel qui aurait pu nourrir la discussion démocratique et aurait aidé à écarter les phantasmes et les interprétations démagogiques. Il n’existe pas de document de synthèse qui résume les articles de l’accord. Il y a bien un document de communication sur le site de l’équipe Barnier mais il explique les avantages de l’accord plus que les détails des mesures proposées. C’est de la communication plus que de l’information. Le manque de souci de vulgarisation, de pédagogie participe de cette déliquescence de la fonction politique, trop laissée aux techniciens de la chose publique.

Deux députés britanniques, un travailliste, un conservateur, nous ont confirmé qu’ils n’ont pas lu l’accord. Et pour cause : trop long, trop technique, trop ardu. Ils s’en sont remis à ce que les services de communication et l’opinion publique en ont rapporté.

Bonjour tristesse : les faiseurs de lois ne lisent même pas les textes les plus fondamentaux pour notre avenir.

Martelons-le à nouveau : God save United Kingdom… and Europe !

 

Michel Taube

Directeur de la publication