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09H04 - vendredi 28 novembre 2014

Nicolas Danet, cofondateur de Simplon : « Pour que le numérique soit une arme populaire ! »

 

simplonLe numérique n’est pas qu’un assemblage de câbles et de puces électroniques. Derrière la technique, il y a des hommes et des femmes qui lui ont donné forme, et ils avaient en tête certaines valeurs. Dans les années 70, les premiers ordinateurs personnels étaient assemblés par des passionnés de l’informatique dans leurs garages de la côte Ouest des Etats-Unis. Ces pionniers du numérique mêlaient ingénieurs et hippies, techniciens et idéalistes, chercheurs et autodidactes. Ces idées communes sont ainsi à l’origine du réseau des réseaux : partage de la connaissance, collaboration horizontale, volonté de construire de nouvelles façons d’exister ensemble. L’architecture technique d’internet s’est aussi faite sur ces bases, grâce à une infrastructure dite « end-to-end » qui permet à une multitude d’objets de se connecter à un réseau qui n’a pas vraiment de centre. Une horizontalité technique issue de valeurs partagées.

A présent, Internet n’appartient plus aux pionniers des origines. Dans les années 90 les ordinateurs familiaux se sont démocratisés. Quelques années plus tard, la généralisation du haut débit comme de l’accès mobile partout dans le monde a fait rentrer internet dans la poche de milliards d’humains. Cette massification de l’utilisation de l’informatique change complètement la donne. La question de l’accès à internet, si elle reste importante dans certaines régions du monde, n’est plus primordiale. La pénétration du numérique est telle que la question principale est et sera de plus en plus la suivante : comment développer des usages populaires du digital permettant d’œuvrer pour une société meilleure? 

Avec sa structure horizontale, Internet est fondamentalement un outil qui déstabilise de nombreuses structures établies de notre société. Des états, des entreprises, des mairies, etc. Le site internet Change.org, par exemple, qui regroupe plus de 75 millions d’internautes dans le monde, permet à n’importe qui de lancer une pétition, mobiliser des individus qui partagent ce combat et faire basculer un décideur sur une question donnée. Chaque jour, ces nouveaux citoyens renouvellent ainsi leur mode de participation à la vie politique de leur pays. Dans des régimes qui peinent à renouveler leurs élites comme à trouver des solutions aux problèmes économiques et sociaux, des outils digitaux apparaissent pour faire entendre la voix des individus. Sans nécessairement passer par les modalités que nous connaissions ; si les gens ne vont pas forcément voter, ils trouvent d’autres moyens d’exprimer politiquement leurs revendications en ligne.

Bien entendu, Internet n’est pas uniquement constitué d’espaces de collaboration oeuvrant pour une société plus égalitaire. En soit, Internet reste un outil, qui peut être utilisé dans un sens comme un autre. Les valeurs à l’origine de sa création donnent des pistes intéressantes pour qui veut s’en saisir mais elles ne sont en aucun cas déterministes. Tout l’enjeu est d’ailleurs là : Internet et le numérique doivent être des opportunités dont nous nous saisissons pour trouver de nouvelles façons de vivre ensemble. Et non reproduire les inégalités et erreurs de notre société actuelle. Un exemple : le monde de la finance. Les critiques ne manquent pas à son égard, entre manque de transparence et profits indécents. Pourtant, la finance utilise des technologies digitales de pointe pour réaliser ses bénéfices. Le trading de haute fréquence nécessite des algorithmes très élaborés et des développeurs très qualifiés pour continuer à engranger de l’argent.

Cet exemple met en valeur deux choses. D’abord, l’importance du numérique et des programmes informatiques dans notre vie. Notre réalité est composée de programmes, et de la finance à notre vie quotidienne nous interagissons avec eux. Ensuite, trop peu de personnes sont encore capables à la fois de voir ces enjeux et de s’en saisir. Douglas Rushkoff, un penseur américain du numérique, estime ainsi que nous sommes entrés dans une ère où il faut alternativement « programmer ou être programmé ». Internet, les programmes et de facto le code font tellement partie de nos vies que passer à côté de ce « savoir numérique » devient risqué, voire liberticide.

Il existe donc un impératif civique et plus largement populaire à se former à l’informatique et à la programmation. Il ne s’agit pas simplement de savoir allumer un ordinateur et de faire une recherche sur Internet. Il s’agit de comprendre que Google est une entreprise qui propose des résultats pour une recherche en fonction de programmes informatiques qui ont été définis par des individus et peuvent contenir des biais. Cette culture numérique permettra aux individus d’utiliser les outils digitaux en toute conscience.   

Cette première étape dessine la seconde : passer du statut d’utilisateur du numérique à celui de créateur. Le numérique est un espace très plastique, que l’on peut rapprocher de la pâte à modeler. Avec de l’imagination, ses possibilités sont infinis, et c’est la raison pour laquelle des enfants jouent à programmer (cela existe!) et apprennent ainsi tout en s’amusant. Il est fascinant de voir des jeunes utiliser le logiciel de programmation graphique Scratch et les voir construire des jeux vidéos et des histoires à l’aide leur ordinateur.

Avec Simplon.co, une formation gratuite à la programmation, nous essayons de démocratiser l’apprentissage du code. Nous cherchons à offrir les clefs qui ouvrent les portes de la création numérique à ceux qui habituellement n’ont pas accès à ce type de formation. Le résultat est en train de s’écrire mais s’annonce déjà fascinant. Nous poursuivons en tout cas notre conviction : donner des outils pour permettre aux gens de s’organiser par le bas. Pour faire du numérique une arme populaire.


 

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